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L’Indépendance, Bourguiba, BCE plusieurs sommités nationales occultés…
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Les représentants des organisations de médias ignorés
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Abderraouf Bettaïeb, pressenti au Cabinet présidentiel, une personnalité trop controversée
Après une première lecture à chaud, nous nous permettons de décortiquer un peu plus le contenu et les messages envoyés par Kaïs Saïed lors de sa première adresse au peuple à travers le discours d’investiture prononcé, ce matin du mercredi 23 octobre 2019, à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
Il est bon de relever que l’allocution du nouveau président de la République a été marquée par des messages directs et indirects au peuple, à la classe politique, aux partis et aux pays frères et amis.
Bien sûr, il a réitéré la nécessité de respecter la Constitution, l’Etat de droit et des institutions ainsi que les lois. Et après avoir mis en relief ce que vient de vivre la Tunisie comme étant une 2ème révolution réalisée dans et avec la légalité et qui a ébloui le monde entier, ce qui est considéré comme étant une exagération populiste, Kaïs Saïed a laissé entendre qu’il n’y aura plus de place à la corruption et qu’aucun millime ne doit être pris frauduleusement. Un principe ordinaire auquel tout un chacun appelle sans la moindre concrétisation. Et d’un !…
Il a réitéré la détermination de poursuivre la lutte contre le terrorisme consistant à « réplique au tir d’une seule cartouche par un terroriste avec une salve de tirs de cartouches par nos vaillantes forces armées et sécuritaires ». Encore un principe qui fait déjà l’unanimité, une envolée de lyrisme en plus. Et de deux !…
Il a mentionné, clairement sans entrer dans les détails, qu’il n’est pas question de revenir sur les droits de la Femme qui méritent même d’être consolidés, notamment sur le plan économique et social. Un message, certes positif, mais qui mérite d’être détaillé, plus précisément concernant le volet de l’égalité successorale. Et de trois !…
A part, donc, ces points ayant un caractère général sans relief et sans nouvelle spécificité, Kaïs Saïed a été clair et déterminé en proclamant l’idée du don d’une journée de travail mensuellement durant les 5 prochaines années par tous les travailleurs et fonctionnaires tunisiens aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Et il a répété que tous les Tunisiens sont d’accord pour appliquer cette opération de don.
Et là, on cale. Car, pour le seul point où le nouveau chef d’Etat s’est montré précis et tranchant, plus point d’interrogation et des zones d’ombre planent. Comment M. Saïed se permet-il d’annoncer une pareille mesure dont personne n’avait été consulté auparavant ?
Ayant été plébiscité avec 72% dans un concours de circonstances trop particulier et trop favorable, le nouveau président de la République croit-il qu’il a les coudées franches pour mettre tout un peuple devant un pareil fait accompli ? Quand on cautionne une présumée demande de sacrifices, on les réclame aux catégories aisées et non pas aux franges nécessiteuses déjà saignées à blanc par un pouvoir d’achat détérioré !
Autrement dit, pour l’unique nouveauté révélée, le chef de l’Etat semble avoir mis les pieds dans le plat puisque les premières réactions de la Centrale syndicale défendant les droits des travailleurs ont été plutôt négatives surtout qu’elle n’a pas été consultée avant une pareille annonce de la plus haute gravité.
Venons-en maintenant aux oublis et aux omissions voulues ou non. Et il y en a eues. On soulignera, d’abord, l’omission de toute dénonciation des violences enregistrées après son élection et de toute mention de la liberté d’expression et de la presse.
A noter à ce propos que les deux principales organisations représentatives de la profession, à savoir, le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) et la Fédération tunisienne des directeurs de journaux (FTDJ) n’ont même pas été invitées à la cérémonie de prestation de serment. Il en était de même pour la HAICA.
D’autres omissions de taille sont à signaler. M. Saïed a-t-il oublié ou décidé sciemment de ne pas citer le Leader Habib Bourguiba. Peut-on se permettre d’occulter, en une pareille circonstance, le père de la 1ère République Tunisienne et le bâtisseur de l’Etat moderne tunisien ?
Peut-on se permettre d’omettre de citer Béji Caïd Essebsi, premier président de la 2ème République élu démocratiquement et directement par le peuple ? Sans oublier qu’il na pipé aucun mot des trois mille ans de civilisations et des nombreux réformateurs ayant marqué l’époque moderne de la Tunisie.
Par contre, Kaïs Saïed s’est illustré par ses cris en qualifiant le peuple tunisien qui l’a élu de grandiose tout en assurant qu’il a ébloui le monde entier dans le sens où en le choisissant, il a réalisé une deuxième révolution dans le respect de la légalité.
Autrement dit, pour le nouveau président de la République, l’histoire de la Tunisie a neuf ans d’existence et n’a commencé qu’avec le déclenchement de la révolution de 2011 !
Kaïs Saïd a eu, bien entendu des passages et des messages positifs dont notamment la mise en exergue de l’obligation de préserver la neutralité des services publics, de combattre la corruption, de veiller à ne pas toucher aux deniers publics, même s’il s’agit d’un seul millime, de ne pas toucher aux droits acquis de la Femme…
En tout état de cause et en dépit des nombreuses lacunes, cela demeure juste un premier discours et qu’il faut attendre d’autres rendez-vous pour tirer de réelles conclusions, sachant que le véritable test sera celui de voir l’ossature du staff qui va travailler en proximité avec le nouveau chef de l’Etat.
Mais là, aussi, les choses ne semblent pas au beau fixe dans le sens où la nomination de M. Abderraouf Bettaïeb au poste de directeur du Cabinet présidentiel ou premier conseiller politique à Carthage suscite une vive polémique à cause de sa personnalité et de ses orientations controversées. Consistant en des prises de positions « extrémistes et populistes ».
En effet si l’on croit les captures d’écran de sa page Facebook, puisqu’il a effacé de nombreux posts, on constate que cet ancien ambassadeur et fonctionnaire de carrière au ministère des Affaires étrangères, traite Bourguiba «d’Antar tueur de poux » et n’hésite pas à défendre le grand défenseur des terroristes, Rached Khiari, qui traite Mohamed Boughalleb d’Abou Jahl sans oublier ses statuts et commentaires tournant en dérision les hommes de média et dénigrant certains hommes et responsables politique de pays frères et amis avec qui, Kaïs Saïed est appelé à composer.
Or, à notre connaissance, M. Abderraouf Bettaïeb serait un grand ami intime du nouveau président de la République. Ce qui nous amène à nous interroger si le nouveau chef de l’Etat connaissait les véritables pensées et thèses, trop dangereuses de son ami et futur proche collaborateur ?!
Comme on le constate, le démarrage de Kaïs Saïed s’annonce ardu et semé d’embûches à tous points de vue dans le sens où son manque d’expériences et sa méconnaissance de la vraie réalité des probables collaborateurs peuvent lui jouer de mauvais tours et le placer, parfois, dans de mauvais draps !…
Noureddine HLAOUI