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Le dîner de tous les dangers
C’est beaucoup d’honneur que nous faisons aux parlementaires européens en les recevant au palais de Carthage. Et plus nous nous montrons avenants à leur égard, plus ils seront prêts à nous monter en épingle. Car, le plus souvent, ils ont tendance à prendre notre magnimité, indulgence et grande patience face à leur récurrentes ingérence dans nos affaires intérieures, pour de la faiblesse, voire un aveu d’impuissance.
L’ État tunisien a, on le sait, beaucoup perdu en prestige au cours de ces dix dernières années. Il était pour ainsi dire devenu comme une annexe des grandes chancelleries. Le pays était devenu une véritable passoire, infesté de prédicateurs mais aussi d’experts en tout qui, le temps d’un court séjour sous nos vieux, trouvent refuge dans les hauteurs de Gammarth. Et si ces mêmes experts semblent connaître le pays, les coulisses et les anti-chambres du pouvoir, des pouvoirs, beaucoup mieux que nous-mêmes sur nous-mêmes, c’est parce qu’ils ont trouvé au sein d’une certaine société civile tunisienne des relais et des sources d’information sans vergogne et foncièrement vénale…
Grand habitué de notre pays,le grand orientaliste Gilles Kepel a hier été reçu à la Kasbah par la cheffe du gouvernement en personne. Il était, il est vrai, reçu en qualité d’envoyé spécial du président français Emmanuel Macron. Il sera peut-être au nombre des conviés au dîner vraisemblablement programmé pour ce soir sur les hauteurs de la chic banlieue nord de Tunis et qui réunira autour de la même table les quelques membres de la commission des affaires étrangères du parlement européens, en fin de mission, et les ambassadeurs des pays du G7 à Tunis. Au menu, sans doute : le devenir de la transition démocratique en Tunisie post 25 juillet 2021, mais surtout et tout particulièrement post 9 avril 2022,date à laquelle le Président Kais Saïd, intransigeant, a réaffirmé haut et fort son absolu refus de toute ingérence étrangère et de tout « retour institutionnel à l’avant 25 juillet ». Une position qu’il a de nouveau réaffirmé en recevant hier à Carthage des parlementaires de la commission des affaires étrangères du parlement européen.
On attendra sans doute l’heure du ‘Shour ‘ avant d’avoir un peu vent de la saveur qu’aurait, à court terme, ce dîner pour le pouvoir aujourd’hui en place et …pour la Tunisie. Le dîner de tous les dangers ? Nous en serons fixés une fois les parlementaires européens rentrés à Bruxelles.
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