TUNIS – UNIVERSNEWS Par Taoufik BOURGOU -« Pasaremos ! » a dit la marionnette du ventriloque.
Sans la congruité de la situation, le slogan passerait pour une éructation d’un exalté, mais la réalité est plus ridicule. L’usage slogan aurait du faire réfléchir « Monsieur le Frère ». Car historiquement face au « Pasaremos » des franquistes aidés par Mussolini et Hitler, il y avait le « Non pasaran » du peuple espagnole. Quand on ne connait pas l’histoire politique et la science politique on ne doit pas s’improviser parolier de la symbolique, on pourrait y perdre sa langue et ses lèvres.
Petite leçon d’histoire, mais toute ressemblance étant fortuite…
Francisco Franco, après avoir écrasé la République Espagnole, légitime et légale, celle dont les partisans ont crié « Non pasaran », a instauré une dictature conservatrice centrée sur la religion, les grands propriétaires et à partir de la fin des années 1950 avec l’aide des Etats-Unis. La régence de Franco a cadenassé l’Espagne, créé un régime brutal et autarcique. Alors quand on crie « Pasaremos » il faut savoir à quoi on fait référence.
De fait, Facebook est comme un outil dangereux. Vous connaissez tous la vidéo du chimpanzé qui s’est emparé d’une kalachnikov ? Les slogans, c’est presque la même chose qu’une kalachnikov entre les mains d’un primate, on n’est jamais sur des ricoches et des balles qui reviennent en boomerang.
Pasaremos ? Pasar donde ! cabron !
« Monsieur Le Frère de » sait déjà que le référendum bidon a déjà « passar », il a déjà enjambé les 7 millions d’électeurs putatifs. Qu’ils votent ou non, qu’ils se déplacent à un seul ou à un 11 millions, le vote est acquis. Pourquoi ? C’est très simple, car « el paso » (le passage) a été garanti par les dispositions transitoires. En effet, le non, le oui, ou l’abstention sont de pure forme et les dispositions écrites par le frère, l’autre, taisent toutes les possibilités. Donc, le « pasaremos » n’a aucune chance de se transformer en « no pasaran »… porque ya han pasado… (ils sont déjà passés). Sauf à nous prendre pour des idiots, l’affaire a été bouclée, ce n’est pas de la ruse, c’est de la tromperie caractérisée. Ca n’a pas d’autre qualificatif. Si c’était une vente, on dira qu’il s’agit d’un « dol ».
L’affaire est une mise en scène rance, ridicule et absurde, la publication du texte du projet a valu entrée en vigueur et le passage était garanti, un peu comme chez les soviets.
Ce qui est absurde en revanche, c’est de dépenser l’argent d’un pays en faillite pour organiser une consultation pour une constitution qui, quoiqu’il en soit entrera en vigueur, sans l’ombre d’un zeste, d’un début de doute. On peut mettre au défi Monsieur le Frère de, de nous prouver le contraire sur le plan du droit constitutionnel, tel qu’il s’enseigne dans les universités dignes de ce nom, pas en Absurdistan.
Dernier point et pas des moindres, quand on mendie le blé, que les avions n’ont plus de pièces de rechange, que les écoles primaires doivent être remises en l’état par une aide de l’UNICEF et par les Tunisiens de l’étranger (D’ailleurs floués par la constitution du 25 juillet qui en discrimine beaucoup issus de mariages mixtes.) on s’abstient de dépenser les maigres deniers por una constitucion aprobada de antemano !
A trop commenter Don Quichotte, on finit par avoir le destin de Rucio (l’âne gris de Sancho Pança… pour rappel).
Taoufik BOURGOU
Politologue, Chercheur au CERDAP2, Sciences Po Grenoble.