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Le taux directeur de la BCT devrait baisser d’une manière considérable, au moins de 2 à 3 points d’autant plus que le plus gros problème est la régression de l’investissement
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Le taux d’intérêt d’une Banque centrale est un moyen pour lutter contre l’inflation mais il n’y a pas nécessairement une relation entre l’inflation et le taux d’intérêt
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Un taux d’intérêt très élevé pousse immédiatement à tout acte d’investissement et cela a un coût sur la croissance et la création de nouveaux postes d’emploi
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Selon la BCT les perspectives des prix à la consommation laissent présager une détente graduelle de l’inflation, mais restent entourées de risques haussiers
TUNIS – UNIVERSNEWS (SEF – Rédaction) – La réduction du taux directeur de la Banque centrale de Tunisie (BCT) refait surface. On en parle déjà depuis de nombreuses semaines, mais l’affaire n’a été prise au sérieux qu’après que la Banque centrale européenne (BCE) a décidé, au début de ce mois, de réduire ses taux d’intérêt de 25 points.
En Tunisie, une telle décision est attendue avec impatience car elle devrait équilibrer la stimulation de la croissance économique avec la maîtrise de l’inflation, relancer l’investissement et réduire les difficultés rencontrées par les entreprises tout en orientant la tendance à la baisse des taux d’intérêt sur le marché financier.
L’expert en économie et ancien ministre des Finances, Hassine Dimassi s’est prononcé en faveur de cette proposition.
Dans son interview accordée à Universnews, il a estimé qu’il «est temps aujourd’hui que la BCT réduise son taux d’intérêt directeur et éviter que l’investissement se bloque davantage», a-t-il dit.
Selon lui, le taux directeur de la BCT devrait baisser d’une manière considérable, au moins de deux ou de trois points d’autant plus que le plus gros problème dans le pays est la régression de l’investissement et la cause principale est le taux directeur de la BCT, selon ce qu’il a dit.
L’expert en économie a, dans le même contexte, assuré qu’un taux d’intérêt élevé a des effets néfastes sur l’économie puisqu’il bloque l’investissement, appelant ainsi à aller dans cette logique de réduction du taux directeur de la BCT dans l’objectif de créer un nouveau dynamisme permettant d’accélérer la croissance et de relancer l’investissement en vue de le transformer, par la suite, en une croissance effective.
Dimassi a tenu outre à préciser que le taux d’intérêt d’une Banque centrale est un moyen pour lutter contre l’inflation mais cela ne signifie pas nécessairement qu’il y a une relation entre l’inflation et le taux d’intérêt et la preuve est que malgré la réduction, plusieurs fois, du taux d’intérêt de la banque centrale, l’inflation demeure encore très élevée.
Il a en outre indiqué qu’une baisse de 0,2 ou 0,3% au niveau du taux de l’inflation ne signifie pas que qu’on a gagné la bataille car les causes sont multiples et compliquées. En effet, l’inflation est la perte du pouvoir d’achat de la monnaie qui se traduit par une augmentation générale et durable des prix. Elle correspond à une augmentation générale des prix des biens et services dans une économie.
Il a toutefois indiqué qu’il est impossible de lutter contre l’inflation en utilisant le taux d’intérêt de la banque centrale : «Malheureusement, c’est la théorie du FMI», a-t-il dit.
Selon lui, la BCT doit aujourd’hui baisser ses taux d’intérêts mais pas pour contrecarrer l’inflation mais plutôt relancer l’investissement et éviter que la situation se détériore davantage. Et d’ajouter que si la Banque centrale augmente son taux directeur cela veut dire que les banques obtiendront moins de liquidité à un taux d’intérêt plus élevé et elles fourniront donc aux agents économiques moins de prêts avec, en plus, des taux d’intérêt plus élevés.
Ainsi, un taux d’intérêt très élevé poussera les investisseurs à renoncer immédiatement à tout acte d’investissement et cela a un coût sur la croissance et la création de nouveaux postes d’emploi.
Il est à noter que le taux d’inflation de la Tunisie est resté stable à 7,2 % en mai dernier. Cette constance résulte de deux facteurs principaux : une accélération dans l’augmentation des prix des produits alimentaires, passant à 9,7 % en mai 2024 contre 9,2 % en avril 2024, et une décélération dans l’augmentation des prix des vêtements et des chaussures, ainsi que dans le groupe “restaurant, cafés et hôtels”, qui ont respectivement enregistré des hausses de 9,5 % (en mai 2024, contre 9,7 % en avril 2024) et de 10,2 % (en mai 2024, contre 10,4 % en avril 2024).
Il semble toutefois que ce taux de 7,2% n’a pas beaucoup convaincu le gouverneur de la BCT à réduire le taux directeur. La semaine dernière, le conseil d’administration de cette institution d’émission s’est réuni et a décidé de maintenir le taux inchangé à 8%.
La BCT a expliqué que les risques entourant la trajectoire future de l’inflation incitent à la prudence et à la patience, et qu’il est important de continuer à soutenir le processus de convergence de l’inflation vers des niveaux soutenables.
Ainsi, selon la BCT les perspectives des prix à la consommation laissent présager une détente graduelle de l’inflation, mais restent entourées de risques haussiers, qui demeurent actifs sur le court et le moyen termes et pourraient dériver, notamment de la remontée des prix internationaux des produits de base et de l’énergie sur fond d’exacerbation des tensions géopolitiques, du stress hydrique, et de la situation des finances publiques surtout, en l’absence de mobilisation des ressources extérieures.