• L’enquête ordonnée par le ministre de la Justice laisse planer des doutes quant la régularité des procédures suivies pour interpeler le patron de « 9alb Tounès »
• Karim Helali se pose en source concernant le ministère public au pôle judiciaire et financier !
L’arrestation de Nabil Karoui, candidat à l’élection présidentielle anticipée et leader du parti 9alb Tounès, vendredi après-midi 23 août 2019, sur l’autoroute entre Béja et Mjez El Bab continue à susciter les réactions les plus diverses et qui sont, pour la plupart, négatives notamment quant à la manière ayant marqué les péripéties de cette arrestation.
En effet, les proches de Nabil Karoui n’hésitent pas à parler d’un véritable enlèvement, puisque Nabil Karoui, en voiture, a été intercepté au point de péage de Mjez El Bab et contraint de sortir du véhicule par un groupe d’individus en civil qui se présentaient comme étant des agents de sécurité avant de l’amener de force, illico presto, à la prison d’El Mornaguia.
Il faut dire aussi, que plusieurs heures durant, il n’y avait aucune information officielle sur ce qui s’est passé, à part celles fournies par les membres de l’équipe se trouvant en compagnie de M. Karoui au moment de l’arrestation.
Même ses avocats assurent qu’ils n’étaient au courant de rien…
Et ce n’est qu’en début de soirée que le porte-parole du ministère de l’Intérieur et celui de la Cour d’Appel au pôle judiciaire et financier ont commencé à fournir des données et des précisions sur l’affaire. Il ressort que munis d’un mandat de dépôt, les agents de l’ordre ont exécuté la mission d’arrestation de l’accusé Nabil Karoui concluant que tout s’est passé selon les procédures d’usage. Point à la ligne.
Mais ce n’est pas l’avis de la défense qui donne, textes de loi à l’appui, des avis complètement différents. Selon les avocats de la défense, l’audience du jour, tenue par la Chambre des mises en accusation, était consacrée uniquement à l’examen de la demande des deux frères Karoui de levée d’interdiction de voyage et du gel des avoirs, sachant qu’il n’ya avait aucun recours de la part du ministère public.
Alors, pour ces mêmes avocats, l’émission d’un mandat de dépôt ne pouvait, en aucun cas, avoir lieu légalement parlant, dans le sens où la Chambre des mises en accusation n’avait pas à émettre un tel mandat dont une copie a circulé sur les réseaux sociaux, mais il était tellement bourré d’erreurs, dont notamment celle portant sur la date, que toute crédibilité lui est enlevée.
En ce même moment, le responsable à Tahya Tounès, Karim Helali, a affirmé qu’il y avait bien eu un recours de la part du ministère public sans pouvoir donner la source. « Je suis la source », criait-il en substance et avec arrogance.
Si on le croit sur ce point, doit-on conclure que des membres de son parti étaient mis au parfum, exclusivement, du déroulement des péripéties du dossier ?
Pourtant, ce même parti s’est dégagé, dans un communiqué rendu public aujourd’hui, de toute implication dans cette affaire tout en défendant, bec et ongles, les décisions prises par la justice.
Or, ce n’est pas l’avis du ministre de la Justice, premier « patron » du ministère public, qui a ordonné l’ouverture d’une enquête sur la régularité des procédures judiciaires suivies dans le déroulement de l’affaire. Cela veut dire que logiquement, le ministre n’aurait pas ordonné une pareille enquête s’il n’y avait pas des zones d’ombre sur la manière de traiter ce dossier.
Sans oublier que plusieurs zones d’ombre planent sur cette affaire puisque l’arrestation touche un candidat qui a des chances sérieuses pour la présidentielle et qui intervient à trois semaines du scrutin du premier tour. Et sans oublier que l’examen de la plainte est intervenu trois ans après son dépôt par I Watch, une organisation aux accointances et aux financements douteux, mis à nu, il n’y a pas longtemps par notre confrère « Business News.
Ainsi, trois ans après, on s’est rappelé de ladite plainte pour l’instruire en temps record malgré la consistance du dossier comprenant des centaines, voire des milliers de documents tout en rappelant que le juge d’instruction avait interrogé Nabil Karoui plus de quinze heures en l’espace de deux jours, sans aboutir à la moindre conclusion.
L’autre question qui se pose est le pourquoi d’une telle célérité dans l’exécution du controversé mandat de dépôt ? Y avait-il urgence ? L’accusé présentait-il un danger ou une menace pour le public ? Surtout que Nabil Karoui s’est toujours présenté à la justice chaque fois qu’il y était convoqué. Autant de questions et bien d’autres qui laissent la place à des doutes quant à l’existence d’autres considérations ayant amené à une pareille situation qui nuit, surtout à l’image de la Tunisie et au processus démocratique dans notre pays.
En effet, un très grand nombre de médias – et non des moindres – ont épinglé le pouvoir et la justice en Tunisie. Le Monde, Jeune Afrique, Le Point, les deux agences principales dans le monde, en l’occurrence, l’AFP et Reuters, pour ne citer que ceux-là, ont évoqué la question, en se posant des questions, l’arrestation de Nabil Karoui
Il est bon de mentionner, que pour la première fois, des dizaines de langues se sont déliées pour critiquer trop sévèrement le chef du gouvernement en lui collant d’une manière directe, les pires des qualificatifs, tellement négatives qu’on préfère ne pas les rapporter, ce qui porte un coup dur au prestige du poste du chef du gouvernement, et ce sans la moindre réaction de la part de l’équipe de La Kasbah.
La journée d’hier a été marquée, également par un autre incident très grave aussi à savoir la « fouille au corps » subie par Hafedh Caïd Essebsi, numéro Un du parti Nidaa Tounès et, surtout, fils du défunt président de la République Mohamed Béji Caïd Essebsi, à l’aéroport de Tunis-Carthage alors qu’il était de retour du Qatar. Et selon les propres termes de HCE, il a été « malmené et maltraité par une fouille humiliante », tellement honteuse qu’il était ému et au bord des larmes.
Et dire que cette fouille a eu, selon les termes d’un communiqué de la Douane, suite à une information (« sabba ») faisant état qu’il était détenteur d’une grosse somme d’argent en devises qui s’élevait, finalement, à moins de 50 euros ! Inadmissible d’humilier un citoyen, juste suite à une « sabba » pour lui signifier, à la fin, qu’il peut partir sans la moindre excuse.
Pourtant, d’une manière ou d’une autre, tout citoyen est en droit de bénéficier d’une action de réhabilitation alors que le « rapporteur de la sabba » devrait être dévoilé et jugé pour avoir induit les autorités en erreur et été la cause d’une telle injustice…
Certaines mauvaises langues vont jusqu’à parler d’une sorte de vengeance « à titre posthume » à l’encontre de BCE !
Jamais deux sans trois, la Cité de la Culture a refusé d’octroyer la grande Salle au parti de Nidaa pour y organiser le 40ème Jour de feu président de la République Béji Caïd Essebsi. Motif invoqué, une circulaire (menchour) interdit la location de la Cité à un parti politique oubliant que BCE reste un symbole et au-dessus de tout « menchour » qui n’a aucune force de loi.
A noter qu’ayant obtenu, au départ, l’accord pour le 5 septembre 2019, les préparatifs allaient bon train pour la tenue de la cérémonie avec mise au point de la chorégraphie par Fadhel Jaziri et lancement des invitations aux personnalités. Et selon Ridha Belhaj, responsable à Nidaa Tounès, on lui avait signifié qu’il y avait des directives pour appliquer strictement ce fameux « menchour » !
Si cette décision était maintenue, il s’agirait, en quelque sorte, d’une deuxième mort pour Béji Caïd Essebsi et une autre vengeance, à titre posthume !
En l’absence de toute réaction du gouvernement, plus précisément de son chef, et avec la multiplication des actes douteux, dont notamment le dernier en date de l’arrestation musclée de Nabil Karoui, nous avons enregistré de nombreuses réactions appelant à mettre un terme à toutes les pratiques qualifiées de répressives et allant jusqu’à s’interroger : Qui « arrêtera Youssef Chahed » ?!!!
Noureddine HLAOUI