Des chiffres affolants et extrêmement inquiétants sur la recrudescence de la criminalité en Tunisie ont été révélés, jeudi 29 novembre, lors d’un séminaire organisé, à Tunis, par l’Institut tunisien des études stratégiques, établissement public relevant de la présidence de la république, et ce en prélude à une étude relative à ce problème que compte réaliser l’Institut.
Ainsi, 185 mille affaires criminelles ont été enregistrées en Tunisie, durant les dix premiers mois de 2018 et le chiffre doit atteindre 200 mille à la fin de l’année, contre 197 mille en 2017.
Le nombre des accusés dans les affaires de 2018 atteint, déjà, plus de 189 mille, contre 197 mille accusés pour les 197 mille affaires enregistrés, au total, en 2017.
Cependant, comme l’a noté le ministre Néji Jalloul, directeur général de l’Institut tunisien des études stratégiques, ce qui est préoccupant dans ce domaine est qu’une très grande proportion des criminels sont des jeunes et des mineurs, à telle enseigne que près de 48% des détenus dans les geôles tunisiennes sont des jeunes et des mineurs.
Il a souligné que la criminalité en Tunisie commence à menacer sérieusement la cohésion et la stabilité sociales. D’autant que son vivier principal, a-t-il dit, sont des jeunes déçus et déboussolés qui se recrutent parmi les enfants ayant interrompu leur scolarité de façon précoce et dont le nombre cumulé depuis la révolution dépasse, aujourd’hui, un million, ainsi que parmi les quelques million et demi de jeunes complètement en marge du système social, n’ayant aucun statut social en particulier.
« La volonté du mal »
Outre les facteurs traditionnels à caractère social et économique liés à la précarité sous toutes ses formes, Néji Jalloul a attribué une bonne part de la recrudescence de la criminalité en Tunisie à la détérioration croissante de la situation politique dans le pays et à l’ambiance délétère qui caractérise le paysage politique tunisien. « La volonté du mal et l’esprit de nuire qui marquent le discours et les comportements politiques se sont reflété sur le vécu quotidien, a-t-il dit qualifiant la criminalité de terrorisme au quotidien.
Or, il ne peut pas y avoir de stabilité politique sans stabilité sociale, a-t-il encore dit appelant à une conjugaison des efforts en vue d’arrêter cette hémorragie représentée par la recrudescence de la criminalité en Tunisie.
En effet, les gouvernorats qui arrivent au premier rang en matière de criminalité en Tunisie sont les plus prospères du pays, soit, par ordre, le Grand Tunis, Sousse, Nabeul et Sfax, tandis que celui de Tataouine qui compte le plus haut taux de chômage en Tunisie arrive en dernière position.
Solutions préconisées
Ainsi, la Tunisie se classe 10ème parmi les pays arabes en matière de recrudescence de la criminalité et 73ème à l’échelle mondiale, alors que l’Etat arabe de Qatar est classé premier à l’échelle mondiale, ayant le taux de criminalité le plus faible, suivi par Singapour qui se prévaut d’appliquer le meilleur système éducatif dans le monde, car, les lacunes du système éducatif et de formation en Tunisie jouent aussi un grand rôle dans la recrudescence de la criminalité, outre l’absence d’horizons et de débauchés. 50% des jeunes tunisiens, y compris les diplômés et des cadres en exercice pensent à émigrer à l’étranger.
A la lumière de cette étude élaborée de manière participative, des solutions vont être proposées pour endiguer le phénomène, comme la création de conseiller familial ou encore d’éducateur spécialisé dans les quartiers dits « chauds », outre les solutions techniques, telle que le renforcement de l’usage des caméras de surveillance.
Les interventions faites au cours du séminaire ont mentionné que cette recrudescence de la criminalité a contribué à alimenter le sentiment d’insécurité chez les citoyens tunisiens qui se manifeste, entre autres, à travers leur tendance à multiplier les moyens de protection et de surveillance de leurs domiciles et établissements économiques et commerciaux.
Salah Ben Hamadi