Par Abdelaziz Kacem
- Il a parjuré tous les accords et traités internationaux, il a dit « Zut », en cinq lettres, à la morale internationale
- Trump, héros tragi-comique en quête d’auteur, a réussi à se faire haïr et mépriser par l’humanité tout entière. C’est aussi une performance.
- Je ne puis ne pas compatir avec la détresse des émirs et des cheikhs du Golfe, qui ont bradé jusqu’à leur feuille de vigne, pour le soutenir.
Donald Trump s’en va, mais le trumpisme demeure. Pour ses électeurs, près de 50% de la population, le bilan de ses quatre années à la Maison blanche est plus que satisfaisant. Par-delà ses pitreries, ses tweets grotesques, et en dépit de la publication de livres dûment référencés sur ses frasques et ses mensonges, l’homme passe pour avoir bien rempli ses engagements.
Peu importe la manière, le slogan « America first », c’est-à-dire les États-Unis ont tous les droits, ne l’a-t-il pas appliqué, à la lettre, au détriment du monde entier ? Il a humilié tous ses alliés, il a fait comprendre à l’Europe que sans l’Amérique, sans lui, elle ne résistera guère, au géant asiatique. Elle doit donc doubler sa quote-part dans le budget de l’OTAN.
Libéré de tout scrupule, et au mépris des toutes les résolutions onusiennes, il exhibe, devant toutes les TV du monde, les dents de scie de sa signature en bas de documents reconnaissant Jérusalem comme capitale du Grand Israël ou lui octroyant le Golan syrien, convaincu en cela que, ce (mal)faisant, il ne fait qu’accélérer la venue du Messie pour régir la fin des Temps. En contrepartie, la secte des Évangéliques se charge de le laver de ses prévarications nombreuses.
On lui a reproché sa gestion calamiteuse de l’épidémie du coronavirus, négligences graves ayant entraîné des ravages parmi ses citoyens. Ce n’est pas moi, dira-t-il. C’est la faute à la Chine, à la Russie, à l’Iran, aux Palestiniens, à l’ONU, à l’Organisation mondiale de la santé, à l’épidémiologiste Antony Fauci. La liste des méchants est longue.
Il a parjuré tous les accords et traités internationaux, il a dit « Zut », en cinq lettres, à la morale internationale, il a coupé les vivres à des instances récalcitrantes, l’ONU, l’UNESCO, l’UNRWA, l’OMS, épargnant, ainsi, des sommes considérables, au Trésor américain.
En plus de ces économies, et dans ce qui ressemble aux pratiques d’une Camorra d’État, il a soutiré des fonds colossaux aux pays du Golfe. Ne serait-il pas ingrat de la part de l’Américain moyen de ne pas reconnaître ce renflouement substantiel du budget en cette période de crise planétaire.
Trump, héros tragi-comique en quête d’auteur, a réussi à se faire haïr et mépriser par l’humanité tout entière. C’est aussi une performance. Mais il n’en a cure. Il est craint, ses sanctions pleuvent tous azimuts. C’est l’essentiel ! Encore quatre ans et il déclencherait une nouvelle guerre froide.
Son départ est on ne peut plus frustrant pour bien des braves gens : les bons suprémacistes blancs, qui cherchent à en découdre avec ces « nègres » arborant, sans vergogne, leur absurde slogan « Black lives matter ».
Reste que « tous les changements, même les plus souhaités, ont leur mélancolie », au sens où l’entendait Anatole France. Et si grand que soit mon ouf de soulagement, j’avoue que ce saltimbanque va me manquer. Je ne puis, en l’occurrence, ne pas penser avec un sentiment informulable à Benyamin Netanyahou, désormais seul, orphelin, face à son procès en corruption.
De même, je ne puis ne pas compatir avec la détresse des émirs et des cheikhs du Golfe, qui ont bradé jusqu’à leur feuille de vigne, pour le soutenir. Eux aussi sont les orphelins éplorés du Maître qui les a pompés et « trumpés ».
Encore un mot sur le vice-président, Mike Pence. Courtisan hors pair et bondieusard de quatre sous, il a prié, imploré tous les saints évangéliques pour la réélection de son Maître. Né de ce côté-ci de la Méditerranée, il aurait fait un bon thuriféraire de ZABA. Je le plains lui aussi.
Qu’en est-il du vainqueur ? Connaissant les constantes de la politique américaine, je préfère ne former aucun espoir sur Joe Biden. Ce dont on peut être sûr, c’est qu’il usera d’un autre style dans ses rapports avec le monde et c’est déjà quelque chose.
A.K.