Tawfik BOURGOU
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Un pays de rente comme l’Algérie n’est pas une bouée de sauvetage
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L’augmentation des impôts sera difficile à actionner dans un pays où 40% de l’économie est informelle avec un nombre élevé de transactions en dehors du circuit bancaire
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Quand on s’endette, on rembourse, ce que la Tunisie a si brillamment fait sous Bourguiba, le père de la Nation Tunisienne et sous Ben Ali
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Les slogans et les véhémences, les conseils des amis, Monsieur Tebboune en l’occurrence, ne construiront pas un plan « B », elles vous enfoncent encore plus
TUNIS – UNIVERSNEWS Bien qu’ayant contresigné la Loi de finance 2023 construite autour de l’hypothèse d’un concours du FMI, le Président Saïed annonce, sans que cela ne prenne encore la forme d’une missive officielle, la fin d’un recours possible au FMI. Aussitôt les laudateurs ont applaudi la décision, en se payant de véhémences. Sans être trop alarmistes, on dira que la Tunisie n’a aucun plan « B ». Les capacités internes sont nulles voire inexistantes. Sauf à intégrer un concours chinois et russe par l’entremise de l’Algérie dans une hypothèse économique qui serait très hasardeuse. Là aussi, il suffit de voir la situation de la soixantaine de pays qui se sont hypothéqués auprès de la Chine. La Russie en voie de défaite militaire inéluctable et qui a vu une de ses banques mettre genou à terre, n’est pas une planche de salut. L’Algérie qui embastille des Tunisiens pour quelques boites de conserves en passant la frontière est une solution aussi bancale que le reste. Un pays de rente comme l’Algérie n’est pas une bouée de sauvetage.
En interne, les capacités de la Tunisie sont médiocres tant le pays a été détruit par la contrebande et les mafias aux frontières que le Président ne cible jamais d’ailleurs. Certains des laudateurs ont sauté le pas et ont parlé d’austérité. Or, les importations tunisiennes sont à 95% vitales pour la survie des Tunisiens et pour le peu qui reste d’un secteur industriel. Bloquer les 5% des importations de « luxe » ne changera rien à l’équation. L’autre levier, la fiscalité et l’augmentation des impôts sera difficile à actionner dans un pays où 40% de l’économie est informelle avec un nombre élevé de transactions en dehors du circuit bancaire.
Quand le président tunisien parle de pressions, quand à l’unisson et à la même heure, Tebboune qui prend la Tunisie pour sa colonie évoque lui aussi les « terribles pressions » à la chaine du Qatar, tous les deux oublient un point important.
Nul besoin d’être un prix Nobel d’économie, c’est du niveau d’un premier cours d’économie en première année universitaire : les pressions viennent des créanciers de la Tunisie qui ne veulent pas perdre leurs fonds. Aucun créancier ne veut risquer le défaut de paiement, non pas par amour pour la Tunisie, juste par anticipation des incidences sur sa propre économie. D’ailleurs, dès l’annonce présidentielle les obligations tunisiennes ont plongé. Quand on ne veut pas subir de pression on ne s’endette pas. Mais quand on s’endette, on rembourse, ce que la Tunisie a si brillamment fait sous Bourguiba, le père de la Nation Tunisienne et sous Ben Ali. C’est la « pseudo » révolution qui a noyé la Tunisie dans les dettes.
La Tunisie doit rembourser ses dettes avec ou sans le concours du FMI, c’est une obligation que le chef de l’Etat semble avoir oublié. Cette obligation enclenchera le mécanisme du passage devant les clubs de donateurs. Que fera alors le Président tunisien ?
En économie, les slogans et les véhémences, les conseils des amis, Monsieur Tebboune en l’occurrence, ne construiront pas un plan « B », elles vous enfoncent encore plus.
T.B.
Politologue