TUNIS – UN/Agences – Le Soudan est au bord d’une énième guerre civile, après la scission entre le nord et le sud. Les affrontements qui opposent l’armée du général Al-Bourhane aux paramilitaires dirigés par « Hemetti » à Khartoum menacent de conduire le Soudan à une guerre civile et de déstabiliser une région déjà fortement troublée.
L’unanimité des appels à la cessation des hostilités – de l’Union européenne à la Russie et des Etats-Unis à la Chine– tend à le montrer : personne n’a intérêt à ce que le Soudan poursuive sa descente aux enfers. Ni ses voisins, ni les grandes puissances, ni surtout les 45 millions de Soudanais qui, en 2019, ont réussi à se débarrasser d’Omar Al-Bachir – visé par un mandat de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre au Darfour et toujours emprisonné à Khartoum – et se débattent aujourd’hui dans une situation proche de la catastrophe humanitaire, pris en otage par deux militaires ambitieux aux intérêts irréconciliables.
La lutte à mort engagée entre les deux généraux qui se partageaient le pouvoir au Soudan depuis leur putsch conjoint de 2021 fait vivre un calvaire, depuis samedi 15 avril, aux 5 millions d’habitants de l’agglomération de Khartoum. Bombardements, tirs croisés, eau et électricité coupées : la capitale de ce pays, l’un des plus pauvres du monde, est au centre des combats qui, en cinq jours, ont fait plus de 270 morts et plus de 1 800 blessés, selon un bilan partiel.
Le conflit menace de dégénérer en une véritable guerre civile, dans un pays où les forces armées sont un outil d’enrichissement au service d’individus et de clans et où la guerre du Darfour (Ouest), jamais éteinte, a causé la mort de 300 000 personnes en vingt ans. Tandis que le général Al-Bourhane est issu de la classe dirigeante traditionnelle du Soudan et soutenu par l’Egypte du maréchal Al-Sissi, son rival, « Hemetti », est originaire des tribus du Darfour, mal représentées au sein du pouvoir central. Ce qui ne l’a pas empêché de mener de terribles opérations de répression et de nettoyage ethnique au Darfour dans les années 2000.
Appel unanime à arrêter les confrontations
La déstabilisation et la menace de partition qui pèse sur le troisième plus grand pays du continent africain font redouter un essaimage régional, la dissémination d’armes et de miliciens. Doté d’une position stratégique grâce à sa façade sur la mer Rouge, axe majeur du commerce mondial, le Soudan est frontalier de sept autres pays. Plusieurs (Libye, République centrafricaine, Soudan du Sud) vivent déjà des situations troublées et le Tchad, pivot de l’influence française dans la région, a souvent vu son régime être menacé par des rébellions venues du Soudan.
L’Union africaine a sonné l’alarme sur un risque d’« escalade vers une véritable guerre », tout doit être fait pour faire cesser les combats en cours, qui illustrent cruellement l’impuissance des démocraties à inciter, par le biais de remises de dettes et d’aides financières, les pays menés par un pouvoir militaire à rendre le pouvoir aux civils.