Décembre prochain, à Bruxelles, se tiendra la réunion tant attendue (et tant redoutée) entre l’Union Européenne et les officiels tunisiens en vue de parapher ce très controversé Accord de libre échange. On sait que la Société civile (frange de gauche essentiellement) et autres altermondialistes y voient un risque potentiel de l’usurpation de la souveraineté tunisienne. Il appellent donc à un référendum.
Encore au stade des négociations dans la perspective de le signer en 2019, si tout va bien, ce qui ne parait pas le cas, l’Accord de libre échange complet et approfondi (ALECA) entre la Tunisie et l’Union européenne, fait déjà couler beaucoup d’encre et de salive de plusieurs côtés sauf, chose bizarre, de la part des officiels qui gardent le silence absolu à son égard.
Ainsi, le sujet a été choisi comme thème d’un colloque scientifique les 23 et 24 novembre, à la Faculté des sciences politiques, juridiques et sociales de Tunis, sous le titre « l’ALECA, quel intérêt pour la Tunisie ».
Auparavant et à maintes reprises, dont une Conférence internationale organisée, au mois d’octobre dernier, à Tunis, les associations et ONG tunisiennes et euro méditerranéenne se réclamant de la gauche et du mouvement altermondialiste, avaient cherché à mettre en garde contre les répercussions négatives de cet Accord sur la Tunisie, dans le cadre d’une campagne soutenue dans ce sens sous diverses formes et tendant, entre autres, à obtenir l’organisation d’un débat national autour de la question.
Mais, davantage qu’un débat national s’achevant par quelques déclarations d’intention solennelles et sans effet, comme le réclamait la société civile tunisienne et euro-méditerranéenne, de gauche et altermondialiste, la conclusion d’un accord de libre échange complet et approfondi (ALECA) entre la Tunisie et l’Union européenne, commande plutôt l’organisation d’un référendum tel que stipulé par l’article 82 de la nouvelle constitution tunisienne pour trancher la question.
Les nombreux défenseurs de ce point de vue estiment que cet accord constitue une sorte d’adhésion de la Tunisie à l’Union européenne, rappelant que les gouvernements de certains Etats européens, aujourd’hui membres de l’Union européenne, comme la France, avaient eu recours à de pareils référendums concernant l’adhésion de leurs pays à l’UE, face à la division de leurs opinions publiques à ce sujet. On se souvient qu’en France, le oui l’avait remporté de justesse sur le non.
Un référendum sur l’ALECA est justifié, selon ses partisans, par l’importance vitale de la question, mais il a le mérité, en même temps, de dégager la responsabilité du gouvernement. Quel que soit le résultat, ce sera un choix démocratique du peuple tunisien.
Sur ce plan, comme l’admettent franchement les responsables, le gouvernement tunisien se trouve sous pression principalement vis-à-vis des partenaires européens. L’accord de libre échange complet et approfondi n’a pas été sollicité par la Tunisie, mais il avait été proposé par l’Union européenne comme « une faveur », « un cadeau » et « un privilège » dont l’UE a cherché à gratifier plus spécialement la Tunisie, parmi tous ses partenaires du pourtour méditerranéen.
La société civile tunisienne et euro méditerranéenne, de gauche et altermondialiste, affirme qu’il s’agit d’un cadeau empoisonné qui va porter atteinte à la souveraineté de l’Etat tunisien, et nuire aux acquis sociaux en Tunisie, entre autres implications, alors que les documents publiés à ce propos par les structures compétentes d l’Union européenne mettent l’accent sur les perspectives prometteuses que cet accord va ouvrir au développement économique et social de la Tunisie dont la souveraineté sera, au contraire, renforcée, avec la préservation de sa liberté de choisir son propre modèle de développement sur la base des spécificités nationales.
Bien que conscient des implications de l’accord sur la Tunisie, du moins à court terme, à en juger par les déclarations des responsables tunisiens, le gouvernement tunisien ne peut pas rejeter cette faveur européenne. L’assistance financière européenne pour la Tunisie atteindra 10 milliards dinars en 2020, pour la période allant de 2011 à 2020.
D’ailleurs, les altermondialistes tunisiens et européens qui se sont mobilisés pour combattre cet Accord de libre échange, selon sa mouture européenne officielle, réclament son réajustement de manière à ce qu’il soit « un accord juste et équilibré » mutuellement avantageux.
Salah Ben Hamadi