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Maintenir l’activité dans un contexte éprouvant de Covid-19 est une réussite, bien que Tunisair n’eût pas de moyens financiers pour la maintenance, ni pour renouveler sa flotte
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L’exploit aussi est que ce transporteur aérien ait pu maintenir ses activités malgré un niveau d’endettement élevé avoisinant les 2 Milliards de dinars
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Tunisair s’est sauvée, en 2021, par cette opération «sale and Leaseback» portant sur l’exploitation de 5 avions Airbus de type «A320 Neo»
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L’assainissement financier dont on parle depuis plusieurs années est au point mort et tarde encore à voir le jour
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Il est pratiquement impossible de gérer une entreprise commerciale dans un marché compétitif avec une règlementation gérant les entreprises publiques.
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Sur l’année 2023, le nombre de passagers a augmenté de 15% et les recettes ont connu une amélioration de 20%
TUNIS – UNIVERSNEWS – Lorsqu’on emprunte un tunnel sombre, sans lumière, on est heureux même d’atteindre la moitié du chemin. C’est le cas de la compagnie nationale aérienne, Tunisair qui, malgré la limitation de sa gestion en dehors de l’esprit public et des lois qui les accablent, a pu maintenir ses activités et accomplir parfaitement les tâches qui lui sont confiées. Les réalisations de l’année 2023 sont bonnes : Le chiffre d’affaires a augmenté de 30% pour atteindre 1,3 Milliards de dinars contre un Milliard de dinars en 2022 et 650 Millions de dinars en 2021.
Ces chiffres prouvent que la compagnie a réussi son pari et a évité la paralysie dans un cadre commercial de concurrence acharnée, malgré les défaillances découlant principalement du processus de gestion d’une entreprise commerciale publique. Il a suffi de la doter des moyens de redécoller, en « injectant » à sa tête un président directeur général, Khaled Chelly, pur produit Tunisair et qui connait les problèmes de l’intérieur, pour que tout redémarre, de nouveau, et que le transporteur national soit prêt à redécoller !!!
Maintenir l’activité de cette compagnie dans un contexte éprouvant de crise sanitaire due à la Covid-19 est une réussite quoi qu’il en soit surtout que durant cette période, de 2020 à 2021, Tunisair n’avait pas les moyens ni pour financer la maintenance, ni pour renouveler sa flotte. Et pour donner à César ce qui lui appartient, Tunisair s’est sauvée, en 2021, par cette opération «sale and Leaseback» portant sur l’achat de 5 avions Airbus de type «A320 Neo». Il s’agit d’une opération financière, au cours de laquelle, une entreprise cède un actif et le reprend en location pour une longue durée. Pour Tunisair c’est un choix qui s’imposait, car ni les banques tunisiennes, ni les institutions financières internationales ou encore l’Etat tunisien, n’étaient disposés à financer ces avions. C’est à partir de ce moment que Tunisair a commencé à reprendre son activité de maintenance.
2 Milliards de dinars de dettes
L’exploit aussi est que le transporteur aérien ait pu maintenir ses activités malgré un niveau d’endettement élevé avoisinant les 2 Milliards de dinars. Sans surprise, le plus gros créancier est l’’Office de l’aviation civile et des aéroports (OACA) avec 1,1 Milliards de dinars d’impayés, dépassant largement les banques avec près de 400 Millions de dinars. Pour le cas des banques, la compagnie a déjà commencé depuis 2022 le remboursement de sa dette et a pu honorer ses engagements.
La prouesse réside aussi dans le fait que Tunisair s’en sort de la Covid avec moins de dégâts. En deux ans seulement, soit en 2020 et 2021, la compagnie a pu récupérer 12 avions clouées au sol par manque de pièces de rechange ou des moyens de maintenance avec ses propres moyens et l’effort de l’équipe de Tunisair. En parallèle, plusieurs compagnies aériennes ont largement profité du soutien de leurs gouvernements : Royal Air Maroc avait bénéficié de 4 Milliards d’euros, Air France de 7 Millions d’euros et Lufthansa de 11 Milliards d’euros. D’autres ont obtenu une subvention couvrant toutes les charges salariales, ce qui n’avait pas été le cas pour Tunisair.
Un manque à gagner de 2,4 Milliards de dinars
Globalement, cette situation a entrainé chez Tunisair, un manque à gagner en termes de chiffres d’affaires de l’ordre de 2,4 Milliards de dinars. Ajoutons à cela, un déficit chronique cumulé sur les années de 2011 à 2019. Mais, heureusement, la compagnie a pu, à partir de l’année 2022, arrêter cette hémorragie à travers la mise en place d’un plan de sauvetage qui porte sur plusieurs points dont le rééchelonnement de toutes les dettes bancaires et la négociation avec les gros créanciers comme la CNSS et la SNDP où les impayés de Tunisair ont atteint la valeur de 60 Millions de dinars pour chacune. Pour le cas de la SNDP, la dernière échéance a été payée en février dernier.
Le plus grand défi auquel est confrontée Tunisair aujourd’hui est de pouvoir remettre en service le plus grand nombre d’avions parmi ceux ayant cessé de fonctionner par manque de pièces de rechange ou de moyens financiers, de relancer ceux qui sont déjà opérationnels et d’éviter un crash financier.
La compagnie travaille actuellement sur la vente des appareils immobilisés ce qui permettra d’assainir en partie la situation financière de la Compagnie
L’autre défi est lié à Tunisair Technics, en fait Tunisair travaille en étroite collaboration avec son centre de maintenance pour l’amélioration de la productivité et afin d’atteindre les normes internationales et éviter de sous-traiter la maintenance des avions de Tunisair par un organisme étranger, ce qui coûte énormément cher et handicape sa compétitivité en termes de coût et de disponibilité.
Un assainissement financier au pied du mur
De plus, l’assainissement financier dont on parle depuis plusieurs années est au point mort. Il y avait juste une petite partie qui a été concrétisée dans le cadre de sauvetage de la Compagnie comme le rééchelonnement des crédits, la réduction des coûts et du nombre des représentations à l’étranger, l’allégement de l’effectif et le départ à la retraite anticipée. Le reste tarde encore à voir le jour, comme c’est le cas du plan de restructuration financière.
Pour atteindre les objectifs escomptés, Tunisair en tant qu’entreprise publique commerciale nécessite plus de souplesse en termes de gestion. Il est pratiquement impossible de gérer un établissement commercial avec cet esprit d’entreprise publique. Aujourd’hui, si on veut changer, il faut commencer par les lois régissant les entreprises publiques qui ont une activité purement commerciale, comme le cas de Tunisair, sinon aucune stratégie ou processus de réforme n’aboutira.
Tous ces ingrédients font que Tunisair ne peut plus faire mieux et récupérer son positionnement d’avant la Révolution, elle peut évoluer oui ! certainement, mais pas comme avant car la conjoncture a tout changé. Avant, on parlait de 10 Millions de touristes étrangers et des chaînes charters qui s’étalent sur 7 mois. Aujourd’hui, il n’y a rien. Même le tourisme n’est plus comme avant. La physionomie du marché a changé. Le nombre des touristes européens s’est réduit considérablement pour céder la place aux Algériens et aux Libyens. De plus, d’autres compagnies privées sont en train de gagner du terrain par rapport à Tunisair.
Des perspectives prometteuses quand même
Malgré toutes ces problématiques, les perspectives sont bonnes et Tunisair est en train de reprendre doucement. Sur l’année 2023, le nombre de passagers a augmenté de 15%, les recettes aussi ont progressé de 20%. En 2024, Tunisair compte continuer sur cette lancée. Elle table sur 16 ou 17 avions opérationnelles contre 12 ou 13 avions en 2023.
Le transporteur tunisien compte également ouvrir deux nouvelles lignes sur l’Afrique, faire voler plus d’avions et augmenter leurs rentabilités.
Tunisair voulait aussi se concentrer sur des lignes rentables et améliorer la productivité non seulement en interne mais aussi dans ses filiales Tunisair technics et Tunisair Handling.
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