Lors de la conférence de presse, tenue jeudi 21 février 2019, Slim Azzabi, coordinateur général du nouveau parti « Tahya Tounès », a fait un exposé détaillé sur la situation du nouveau mouvement et les étapes à venir en vue de l’achèvement de la constitution de ses structures.
Ainsi, le public a pris connaissance des trois membres fondateurs, en l’occurrence Slim Azzabi, Mustapha Ben Ahmed et NedraTlili, des dispositions prises pour la tenue prochaine du congrès électif du parti, des pourparlers avec d’autres mouvements politiques et des personnalités nationale pour leur éventuel ralliement tout en évoquant la nature des relations avec Youssef Chahed, le gouvernement, le parti Ennahdha, Nidaa, etc.
Concernant la dénomination du parti et de son logo, dévoilé par la même occasion, M. Azzabi persiste et signe en affirmant qu’il n’y a aucune anomalie en évoquant l’argument « massue », que c’est la base qui l’a choisi par SMS. N’empêche qu’avec cette dénomination, le nouveau parti a eu le « mérite » d’avoir privé les Tunisiennes et les Tunisiens de scander, dorénavant « tahya Tounès ». D’ailleurs, Youssef Chahed, lors de sa dernière adresse télévisée, il a conclu, pour la première fois par un « vive la démocratie en Tunisie » !!!
Allons donc ! D’abord, outre la difficulté de vérifier le choix par la base, le coordinateur général oublie de dire que le choix a été fait parmi trois propositions initiées par le staff fondateur. Donc, à l’origine, ce n’est pas le choix de la base, mais bel et bien un choix orienté. Autrement dit, il s’agit d’un plagiat prémédité et voulu, sans oublier le « V » de la victoire pour le logo, lui aussi plagié.
D’ailleurs, un problème se pose dans le sens où plusieurs anciennes affiches sont toujours brandies et collées au mur de certains organismes officiels, dont les sièges municipaux, avec l’inscription (blanc sur rouge), « tahyatounès ». C’est dire que le nouveau parti tient à jouer sur les amalgames et dont il profite au maximum.
En effet, les dirigeants du parti jouent beaucoup sur les termes « officiellement, légalement, constitutionnellement, … » pour justifier certaines pratiques qui leur sont reprochées. Ainsi, aussi bien les dirigeants du parti que des membres du gouvernement, et à leur tête, le porte-parole IyadDahmani, essaient d’être rassurants en jurant leurs dieux qu’il n’y a aucune exploitation matérielle de l’appareil de l’Etat, mais ils ignorent l’exploitation morale, même non voulue, de l’appartenance à la fois aux structures et de l’Etat et du parti.
L’appartenance à l’Etat confère un attrait indéniable pour le nouveau parti et constitue un atout et un avantage beaucoup plus consistants que l’usage des bus des sociétés étatiques. Idem pour la constitution du parti en elle-même. Part-on d’un parti pour parvenir au pouvoir ou utilise-t-on le pouvoir pour constituer un parti afin de se maintenir et renforcer son pouvoir ?
Dans cet ordre d’idées, on nous rebat les oreilles que Youssef Chahed bénéficie de plus de 30% des intentions de vote lors ‘un éventuel scrutin présidentiel. A ceux-là, il est bon de rappeler que Mehdi Jomâa caracolait dans les sondages d’intention de vote avec 65% ! C’est dire l’attrait qu’on exerce lorsqu’on est au pouvoir.
Outre toutes ces imbrications entre le nouveau parti et le gouvernement que les parties concernées justifient par le fait qu’il n’ya aucune opposition juridique ou constitutionnelle à cela. On y est. Le gouvernement et Tahya Tounès exploitent les brèches et les silences de la loi et de la Constitution pour enfreindre le bon sens, la morale et l’éthique dans toute action politique qui devrait primer dans toute opération touchant à la chose publique.
Exploitant à fond ces « silences », les initiateurs du nouveau parti n’ont pas hésité à user de leur notoriété dans l’équipe gouvernementale pour donner de la puissance et de l’envergure au nouveau-né politique
La dernière trouvaille est la nomination de Chawki Gueddas, président de l’Instance nationale de protection des données personnelles en tant que président du comité d’organisation du premier congrès du parti. Et encore une fois, on nous rétorque que rien dans la loi ne s’oppose à ce fait. C’est à croire que M. Gueddas travaille chez le nouveau parti.
Le comble, c’est que M. Gueddas, qui jouit pourtant de l’estime et la considération de tous ceux qui le connaissent, ait accepté cette mission et trouve qu’il s’agit d’un fait anodin et que même il peut prendre deux mois de mise en disponibilité pour se consacrer à sa mission chez « tahyatounès » ! Sans oublier que pour prouver sa soi-disant « indépendance et son positionnement à équidistance de tous les partis, il a annoncé qu’il est prêt à présider le congrès de tout autre parti si on faisait appel à lui ». Le comble de la honte !
D’ailleurs, la décision de la Ligue des Instances indépendantes de suspendre son adhésion en dit long sur son erreur gravissime et sur l’unanimité ou presque des réactions négatives à sa décision de se mettre au service de tahya Tounès ». Plus encore, le parti AlJoumhouri et l’association ATIDE réclament la démission de Gueddas.
Le comble aussi, c’est que les initiateurs de Tahya Tounès n’ont cure des critiques et des remarques des observateurs. Ils donnent l’impression de dire : On a le pouvoir, on est en position de force, on fait ce qu’on veut même si c’est contre l’éthique et la morale …et que la « caravane passe »…
En tout état de cause, les observateurs estiment que les patrons du nouveau « parti du gouvernement » semblent être grisés par la sensation de force que leur procure La Kasbah oubliant qu’ils sont en train de se mettre sur le dos, plusieurs composantes du paysage partisan et politique dans le pays sans oublier les multiples formations de la société civile.
Noureddine HLAOUI