- Vers un gouvernement restreint composé de compétences nationales et patriotiques
- Ennahdha adopte un profil bas, mais menace que « s’il n’est pas associé à la formation du gouvernement, il n’y aura pas de stabilité dans le pays »
- Des conseils pour que Nadia Akacha retrouve son poids réel et son vrai rayon d’action.
Le président de la République a tranché en choisissant Hichem Mechichi, actuel ministre de l’Intérieur, pour former le futur gouvernement, sans prendre en considération les noms proposés par les différents partis politiques.
Ainsi, après la multiplication des ballons d’essai diffusant plusieurs candidats allant de Fadhel Abdelkéfi à Hakim Ben Hammouda en passant par les Khayyâm Turki et Mohamed Salah Ben Aissa, le chef de l’Etat semblait avoir ses convictions et ses candidats étaient, au départ, Imed Hazgui, ministre de la Défense, qui se serait excusé de ce cette mission, et Hichem Mechichi, ministre de l’Intérieur, qui a accepté d’assumer la responsabilité.
C’est dire que Kaïs Saïed est resté fidèle à sa démarche loin des arcanes traditionnels de la politique politicienne. Et acore une fois, il a réussi à surprendre les partis et la classe politique en général.
Certaines parties ont évoqué l’influence et le poids de certaines puissances étrangères dont notamment la France et les Etats-Unis d’Amérique. Plus encore, certains sont allés jusqu’à prédire le choix de Khayyâm Turki dans la mesure où il bénéficierait des faveurs de la cheffe de cabinet de la présidence de la République, Nadia Akacha, qualifiée «d’homme fort » au Palais de Carthage ancienne proche de l’épouse de Kaïs Saïed.
Maintenant que les dés sont jetés, place aux premières évaluations, réactions et projections d’avenir. Pour l’évaluation, nous pensons qu’il n’y a pas mieux que le témoignage que nous avons publié, aujourd’hui même, de l’ancien ministre du Transport et des Affaires sociales, Mahmoud Ben Romdhane qui s’est exprimé en bonne connaissance de cause dans le sens où Hichem Mechichi était son compagnon le plus proche en tant que directeur de cabinet au sein des deux départements en questions. Voici un bref rappel de ce qu’il en pense :
« Partout, il a forcé le respect de tous ses collègues et des syndicats dont les deux ministères étaient la place forte. Il en est ainsi parce qu’il est convaincant, doté d’un haut niveau de compétence, parce qu’il est d’une grande probité, et parce qu’il démontre, à chaque instant, un sens aigu de l’Etat et un grand respect des institutions. Il est pondéré, animé d’une grande sagesse, d’une modestie exemplaire. Il a un sens politique très fin… »
«Je suis encore plus heureux pour la Tunisie d’avoir la chance d’être gouvernée, je l’espère, par un homme de sa trempe et de son intégrité… ».
Pour les réactions, sans être adepte du terme « unanimité », disons que le nouveau candidat à La Kasbah n’a fait d’aucun propos négatif, abstraction faite des statuts dénigrants à l’encontre du président de la République de la part des armadas de « mouches bleues » ainsi que les responsables d’Al Karama dirigés par les anciens bandits des tristement célèbres LPR dissoutes
Toutefois, Ennahdha a été le parti le plus critique envers la décision du chef de l’Etat et à un degré moindre le courant démocratique, avec ses deux composantes, Attayar et Echaâb, qui continuent à prôner l’option d’un gouvernement politique et partisan, une option qui privilégie le « partage du gâteau sous forme de quotas », mais qui a démontré ses limites et ses déboires dans le sens où elle débouche sur la proposition de ministres incompétents qui ne savent rien d’autre que le lancement de slogans creux dont notamment celui de la lutte contre la corruption.
Or, le moment venu, ils s’avèrent être les premiers à camoufler les vérités et couvrir les fraudeurs et les ceux qui s’approprient les biens publics comme cela a été le cas avec le ministre de l’Industrie Salah Ben Youssef, le député, Jalel Zayati, le ministre de l’Energie, le Nahdhaoui Mongi Marzouk, le super ministre du Transport, Anouar Maârouf et sa fille, et le chef du gouvernement démissionnaire, Elyès Fakhfakh, qui a été défendu bec et ongles jusqu’au dernier moment par les « Messieurs propres » d’Attayar, seul parti à avoir proposé ses « barons » au poste de chef du gouvernement prouvant leur « avidité » et leur attachement, coûte que coûte, à rester au pouvoir.
Il est vrai que nombreuses ont été les voix qui se sont élevées pour appeler à un cabinet restreint composé, uniquement de compétences nationales, afin d’œuvrer à la réussite de l’action de sauvetage qui constitue, il ne faut pas l’oublier et vu la situation socioéconomique dramatique par laquelle passe le pays, la mission principale confiée au prochain gouvernement avec obligation de résultat à l’issue du mandat de quatre ans restants avec évaluation et suivi réguliers du bilan afin de s’assurer que la pays avance sur la bonne voie salvatrice.
D’ailleurs, notre journal a été le premier à lancer un appel, avec analyse que nous avons voulu objective, pour un gouvernement de technocrate composé de compétences nationales et patriotiques.
Sur un autre plan, tout en restant dans le même ordre d’idées, force est de reconnaître que le choix de Hichem Mechichi laisse entrevoir l’aspect sécuritaire qui a y prévalu, sachant que dans ses interventions, le président Saïed a souvent mis en garde contre les complots tramés dans « les chambres noires et fermées » tout en affirmant que les forces militaires et sécuritaires constituent un rempart fiable et efficace pour y faire face.
Dans la même foulée, il est nécessaire d’attirer l’attention du chef de l’Etat que le rôle de Nadia Akacha, que certains lui attribuent une proximité avec la « Première Dame », commence à prendre de l’ampleur et de l’envergure que son poste ne justifie point.
Il faut dire que sa présence « collante » et systématique à toutes les audiences et activités présidentielles ainsi que sa proximité du tandem Chahed/Azzabi et, par voie de conséquence de l’axe français et de son ambassadeur partant, Olivier Poivre d’Arvor, ont alimenté les indiscrétions quant à son éventuel interventionnisme dans les affaires de l’Etat, d’où les conseils pour que cette responsable retrouve son poids réel et son rayon d’action.
En tout état de cause, le chef du gouvernemenchargé est conscient de la lourdeur et de la délicatesse de la responsabilité qui lui incombe surtout après que des responsables d’Ennahdha ont clairement menacé que « s’il n’est pas associé à la formation du gouvernement, il n’y aura pas de stabilité dans le pays », des propos imprécis certes, mais qui peuvent supporter les pires interprétations porteuses des pires scénarios.
On n’en est pas encore là. L’essentiel c’est d’accorder des préjugés favorables à Hichem Mechichi pour servir la Tunisie et les intérêts supérieurs de la patrie…
Noureddine HLAOUI