Les travaux du congrès électif de Nidaa Tounès ont finalement démarré ce matin du samedi 6 avril 2019 par un discours de Béji Caïd Essebsi, président de la République et président d’honneur de Nidaa.
Il y a lieu de noter, d’abord, qu’il ne s’agissait pas d’un discours officiel d’Etat, mais de propos dignes d’un leader politique haranguant la foule dans un meeting populaire.
Après un récapitulatif historique des premiers pas dans la formation de Nidaa en 2012, dont les pratiques d’intimidation des « islamistes barbus, parfois en pleine Avenue Bourguiba tout près du ministère de l’Intérieur, et ce au vu et au su de tout le monde sans que le pouvoir de la troïka, à l’époque, ne bronche et ne prenne les mesures et les sanctions qui d’imposaient.
BCE, tout en reconnaissant les difficultés et les divisions par lesquelles est passé Nidaa, a estimé que Nidaa, avec ce qui lui reste, est capable de jouer une rôle important sur la scène politique et partisane durant les mois qui précèdent les prochaines élections législatives et présidentielle de fin 2019, mais à condition que les forces centristes et modernistes soient conscientes des défis qui les attendent et des défis qu’ils doivent relever afin d’espérer maintenir en vie un régime démocratique et civil.
Et c’est cet esprit qu’il a tenu à mettre en exergue l’initiative concernant l’égalité successorale que seul le parti islamiste d’Ennahdha rejette catégoriquement avant d’annoncer qu’il n’a pas la volonté de briguer un second mandat présidentiel même si la loi le lui permet. « En tout cas, chaque chose en son temps », a-t-il fini par laisser tomber. Autrement dit, tout reste possible et Béji Caïd Essebsi peut annoncer sa candidature au dernier moment avant les délais réglementaires pour le dépôt des candidatures.
D’autres moments forts ont marqué le discours de BCE dont notamment celui de son appel aux Nidaïstes de lever le gel de l’adhésion du chef du gouvernement, Youssef Chahed au sein de Nidaa afin de lui laisser la liberté d’opter pour le parti de son choix, à savoir rester à Nidaa ou rallier le parti qui est en train de se constituer.
Et après avoir révélé que Nidaa devait prendre la dénomination de « Tahya Tounès » qui était d’ailleurs, son slogan, BCE a exhorté les Nidaïstes de prôner l’union et le regroupement des forces centristes en un seul front pour réaliser la victoire et maintenir le camp démocratique, progressiste et moderniste dans la gestion des affaires du pays.
Et de conclure par un appel pathétique lancé aux congressistes : « La Tunisie est malade et l’unique remède réside dans votre union en en seul rassemblement centriste… ».
Ainsi, outre le fait qu’il n’a pas tranché d’une manière catégorique la question concernant sa candidature ou non pour un deuxième mandat présidentiel, Béji Caïd Essebsi a renouvelé les appels du pieds, voire directs, à Youssef Chahed pour un retour au bercail au sein d’un seul front qui, peu importe, s’appelle Nidaa Tounès ou Tahya Tounès.
Cette fois-ci, BCE n’a fait aucun clin d’œil à Ennahdha, axant son intervention sur la nécessité de regrouper de nouveau le front centriste, avec l’idée claire de soustraire Youssef Chahed de sous la coup du parti islamiste et faire revivre la grande dynamique de 2013/2014avec un front unique de salut. Mais Youssef Chahed l’entendra t-il de cette oreille ?
Car, le chef du gouvernement, plus ambitieux que jamais, prendra t-il le risque d’avoir Ennahdha sur le dos en ces moments précis ? Une éventuelle alliance en front uni avec Nidaa est-elle exempte de « périls » dans le sens où, dans ce cas, acceptera t-il d’avoir un rôle autre que celui de « zaim » ? Et surtout sera-t-il accepté en tant que tel, afin d’être le candidat d’un pareil regroupement à la présidentielle.
Certaines voix s’élèvent, d’ores et déjà, pour dire qu’il pourrait s’agir d’une manœuvre de BCE afin d’amadouer son ancien poulain et l’éloigner d’Ennahdha avant qu’il leur « fasse leur fête » à tous les deux par la suite…
En effet, peut-on croire que Béji Caïd Essebsi ait vite fait d’oublier les humiliations que lui avait fait subir M. Chahed durant les dix derniers mois ? Peut-on concevoir un retour d’un climat de confiance entre les deux hommes aussi rapidement ? A moins que des gages solides aient été donnés par les uns et les autres afin de reprendre la lune de miel entamée il y a trois ans.
Normalement et théoriquement, une nouvelle alliance, saine et solide entre les deux clans de « Bejbouj » et « Djo » en une seule force serait le meilleur des scénarios pour éviter à la Tunisie les méandres de cette trouvaille dangereuse qu’est l’Islam politique au moment où cette expérience est en train de battre de l’aile partout, y compris dans son fief turc où Erdogan multiplie les revers et les camouflets
Qui vivra verra !……
Noureddine HLAOUI