Un groupe d’experts participant à une table ronde intitulée « neuf ans après la révolution » organisée jeudi 16 janvier 2020 à Tunis, par l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), ont convenu que « la révolution tunisienne a réussi à consacrer la liberté, sans pour autant assurer la dignité ».
Les interventions des spécialistes en droit, en sociologie et en l’histoire, ont convenu que « la révolution tunisienne a connu un demi succès », au vu de « sa réussite dans la consécration des libertés politiques et sociales, en contrepartie de son échec dans la réalisation de la justice sociale, eu égard à la situation économique et financière critique à laquelle fait face la Tunisie ».
Le professeur de droit constitutionnel, Iyadh Ben Achour, a attribué à ce propos « l’échec de révolution dans la réalisation de la justice sociale » à plusieurs motifs, dont notamment « l’adoption par les partis politiques, de programmes non délimités par des délais butoirs de réalisation, ainsi que l’adoption de politiques non conformes à la réalité sociale et ne répondant pas à l’état d’urgence dans le pays ».
« Le grand ralentissement dans le processus de la formation des gouvernements successifs, leur instabilité et leur manque de sérieux, l’absence de la bonne gouvernance dans l’arène politique ainsi que les contradictions prévalant entre les orientations de la présidence du gouvernement et la présidence de la République, ont encore accentué l’échec de la révolution dans l’atteinte de ses véritables objectifs », a-t-il ajouté.
Pour sa part, le professeur de sociologie politique Abdelwahab Hfaiedh, a évoqué le « manquement » d’un certain nombre de composantes de la société civile en Tunisie, « dans leurs efforts déployés pour atteindre les objectifs de la révolution ».
« De nombreuses organisations et associations ne vouent pas de respect aux principes de la démocratie et sont impliquées dans l’extrémisme violent et dans la réception de fonds, entourés par des soupçons de blanchiment d’argent « , a-t-il déploré.
Il a souligné la nécessité « d’œuvrer à rectifier les orientations de ces associations afin qu’elles s’acquittent d’un rôle plus efficace à l’avenir », rappelant que le nombre d’associations en Tunisie s’élève actuellement à 18 mille associations, dont seulement 3000 associations jouant un rôle actif et efficace, a-t-il estimé.
De son côté, le professeur d’histoire politique contemporaine et actuelle Abdellatif Hannachi, a estimé que la Tunisie « traverse actuellement une phase critique » compte tenu de « la situation politique marquée par les perturbations et les tiraillements idéologiques et politiques au niveau régional ». Il a indiqué à cet égard que « l’UGTT est en mesure de jouer un rôle d’ajustement, de nature à promouvoir l’élaboration d’un programme économique et social et qui serait capable d’atteindre les objectifs de la révolution ».
Pour sa part, le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi, tout en relevant avec satisfaction que la Tunisie avait réalisé de grands progrès au niveau des libertés publiques, individuelles et démocratiques, a estimé qu’elle n’a « rien apporté aux catégories moyennes et précaires ».