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Les critiques ont pour toile de fond, la mutation du procureur de la République près le Tribunal de 1ère instance de Tunis
C’est du jamais vu. On a l’habitude de voir les politiciens se chamailler entre eux et se lancer des accusations à la limité de la diffamation, mais on n’a jamais imaginé, un seul instant, qu’un cirque pareil toucherait le corps de la magistrature où les juges, voire les premiers responsables des plus hautes instance de la corporation, se lancent les pires des accusations dont notamment la corruption, l’abus de pouvoir et les ingérences dans les affaires entre les justiciables.
En procédant, ainsi, à un lavage du linge sale sur la voie publique puisqu’à coups de déclarations médiatiques et autres conférences de presse, devenues nombreuses, ces juges donnent une piètre image de ce corps, habituellement au-dessus des mêlées et des tiraillements.
Quelle mouche les a piqués alors pour qu’ils étalent leurs différends ? Et bien, ils sont atteints du syndrome politique dans le sens où certains magistrats ne cachent plus leur appartenance ou leur sympathie et autre proximité avec tel ou autre parti qui, à leur tour, se dévoilent en défendant tel ou autre juge.
L’étincelle est partie, cette fois-ci, suite au mouvement de la magistrature effectué, normalement, par le CSM. Mais si le Syndicat des magistrats tunisiens (SMT) n’a affiché aucune opposition voire même pas des observations, l’Association des magistrats tunisiens (AMT) n’a pas arrêté de crier sa colère en accusant le CSM de favoritisme et de pratique de la politique des deux poids, deux mesures.
Après une déclaration aux médias, le président de l’AMT, Anas Lahmadi, a tenu, une conférence pour réitérer les reproches aux décisions du CSM à savoir la mutation de l’épouse du président de la République, alors qu’elle ne s’en est pas plainte, et la critique adressée au procurer général près la Cour de Nabeul l’accusant d’interventionnisme empêchant l’incarcération d’un homme d’affaire qui n’a pas respecté le confinement et du directeur d’une chaîne de télévision après avoir été l’auteur d’un accident de la route !
Or, il est vrai que toute ingérence ou abus de pouvoir sons condamnables, mais sans apporter de documents prouvant l’ingérence du procureur général en question, le président de l’AMT a fait tout ce branle-bas, non pas pour des affaires de corruption, mais selon certains observateurs, pour des « futilités » qui restent à prouver
Mais en intervenant sur un des plateaux de radio, M. Lahmadi a fini par avouer le fond de ses positions qui n’est autre son dépit suite à la mutation de Béchir Akremi, ex-procureur de la République près le Tribunal de première instance de Tunis qui, il faut l’avouer, a été toujours défendu, bec et ongles, par le parti islamiste Ennahdha.
En tout état de cause, la bagarre entre l’AMT et le CSM, qui a motivé et justifié ses décisions pour ledit mouvement, donne une image triste du corps de la magistrature, ce qui altère grandement la confiance des justiciables en ce pouvoir sensé être le dernier rempart pour faire régner la bonne gouvernance et la transparence dans tous les rouages de l’Etat.
Bon à rappeler qu’une fois passée la première transe de la révolution, Lazhar Karoui Chebbi, ministre de la Justice à l’époque, avait proposé la tenue d’un congrès unificateur en vue de dépasser l’état de deux associations (SMT et AMT) et de faire émerger une seule organisation représentative de l’ensemble des magistrats , mais l’AMT présidé, à l’époque par Ahmed Rahmouni, avait refusé la proposition, pourtant logique et empreinte d’esprit démocratique.
Noureddine HLAOUI