TUNIS – UN/Agences – Avant de couler mercredi 14 juin, entraînant avec lui des centaines d’êtres humains, le bateau de pêche qui transportait des migrants est parti de Tobrouk, en Libye. Le pays est depuis plus de dix ans au cœur des flux migratoires d’Afrique et du Moyen-Orient vers l’Europe. Eclatée sous l’influence de plusieurs acteurs qui se partagent les restes d’un Etat failli, la Libye est souvent décrite comme une prison à ciel ouvert pour les migrants, où brigades et passeurs font commerce de la misère humaine. Auparavant concentrées à l’ouest, les traversées se multiplient depuis la région Cyrénaïque, à l’est de la Libye.
Depuis des années, les départs de migrants se font en grande majorité depuis l’Ouest libyen, bien plus proche des côtes italiennes. Mais ce nouveau chemin migratoire se développe fortement et représente depuis janvier environ 59 % des départs de Libye, selon l’Organisation internationale des migrations.
A la suite de ce drame, nombreux sont les pays occidentaux qui accusent le maréchal Khalifa Haftar de favoriser ou, du moins « de fermer les yeux » sur ce trafic d’êtres humains qui cherchent à se rapprocher le plus possible des côtes méditerranéennes pour atteindre l’Europe.
Pourtant les pays européens ont poussé les autorités libyennes et les garde-côtes à détenir et à intercepter les migrants qui tentent de rejoindre les côtes européennes. Beaucoup de ceux qui ont été interceptés et renvoyés en Libye -y compris des femmes et des enfants- sont détenus dans des centres gérés par le gouvernement où ils subissent des abus, notamment des actes de torture, des viols et des extorsions, selon des groupes de défense des droits
Selon des associations libyennes d’aide aux migrants, les autorités libyennes ont libéré début juin, des milliers de migrants détenus dans des entrepôts de trafiquants d’êtres humains… avant de les entasser dans un hangar à la frontière égyptienne.
Près de 6 000 exilés, dont de nombreux Égyptiens, ont ainsi été « libérés » au cours de deux raids lancés dans la ville de Musaid, et d’autres localités de l’est.
Des vidéos relayées sur le compte Facebook de l’association Al-Abreen montrent des milliers de personnes marchant dans le désert après les assauts libyens. Souvent dissimulés dans des entrepôts vides ou des usines désaffectées, ces lieux de détention informels utilisés par les trafiquants sont de véritables zones de non-droit où les conditions de vie des migrants sont indignes.
Mais après leur « libération », les exilés ont été emmenés dans une autre forme de prison : un immense hangar à la frontière égyptienne où ils sont actuellement parqués dans des conditions de vie « difficiles et inhumaines », selon Al-Abreen.