- Les résultats de l’appel d’offres n’ont pas été approuvés par la Haute Instance de la commande publique et le refus est expliqué par le «caractère inacceptable des conditions financières proposées».
- Les entreprises chinoises, dopées par le récent rapprochement entre la Tunisie et la Chine qui ont hissé leur coopération au rang de partenariat stratégique seraient intéressées
- Une entreprise chinoise a été retenue comme une candidate favorite pour remporter ce marché aux côtés du groupe français Bouygues
- A priori, les Chinois ont de fortes chances de remporter ce marché pour peu qu’ils exploitent, à bon escient l’abandon de la Tunisie par le monde occidental dans ses négociations avec le FMI
TUNIS – UNIVERSNEWS (SEF – Khemaïes KRIMI) – En stand bye, depuis plus de 15 ans, le projet de construction d’un port en eaux profondes à Enfidha (centre de Tunisie) refait surface. On parle de nouveau de ce projet tant attendu dans les sphères du pouvoir.
Interpellée sur ce dossier par des députés, lors d’une séance plénière d’audition, tenue, le 17 juillet 2024, au parlement, la ministre de l’Équipement et de l’Habitat, également chargée du ministère du Transport, Sarra Zâafrani Zanzri a apporté trois éléments d’information importants.
Le premier concerne l’attachement continu du gouvernement à la finalisation de ce mégaprojet: «le projet de port en eaux profondes à Enfidha doit être réalisé, car il revêt une importance stratégique pour la Tunisie», a-t-elle dit.
Le deuxième élément d’information porte sur l’engagement du gouvernement à réaliser ce port en coordination et en harmonie avec les cinq autres ports commerciaux du pays », a-t-elle révélé. Dans le passé, on ne parlait pas de cette coordination.
Option pour la recherche d’un partenaire stratégique
Quant au troisième élément, il a trait à l’option du gouvernement «pour la recherche d’un partenaire stratégique qui ne demande aucune garantie souveraine ou autre garantie réelle».
Cette option serait la leçon tirée de l’appel d’offres infructueux dont a fait, récemment, l’objet ce mégaprojet.
Lors du dernier marathon budgétaire (décembre 2023), le prédécesseur de Mme Zenzri, en l’occurrence, Rabi Majidi, a révélé que les résultats de l’appel d’offres n’ont pas été approuvés par la Haute Instance de la commande publique. Le refus est expliqué par le «caractère inacceptable des conditions financières proposées».
Parmi ces conditions, figurerait, semble-t-il, la garantie souveraine de l’Etat, dénommée également « obligation de l’Etat » ou « obligation souveraine ».
Utilisées pour financer des projets d’infrastructure, les obligations d’État sont généralement considérées comme les investissements les plus sûrs sur les marchés financiers, car elles sont garanties par la capacité du gouvernement à lever des fonds pour rembourser sa dette. Les investisseurs achètent des obligations d’État en prêtant de l’argent au gouvernement et reçoivent des intérêts réguliers jusqu’à l’échéance, date à laquelle le gouvernement rembourse le capital initial.
Malheureusement, la Tunisie, confrontée actuellement à un rating international très défavorable (Caa2 stable) et à l’insoutenabilité de sa dette, c’est-à-dire à l’incapacité d’emprunter et d’investir, ne peut pas apparemment honorer cette clause.
Pour transcender cette situation, l’ancien ministre Rabi Majidi avait évoqué trois options, soit en soumettant une nouvelle demande pour des appels d’offres, soit en trouvant un investisseur stratégique, soit en réinventant le projet.
C’est la deuxième option qui a été retenue. Cette même option dont parlait plus haut Mme Zenzri.
Les entreprises chinoises seraient les mieux placées pour remporter ce marché
Selon nos informations, les entreprises chinoises, dopées par le récent rapprochement au plus haut niveau entre la Tunisie et la Chine qui ont hissé leur coopération au rang de partenariat stratégique seraient intéressées par ce projet.
D’ailleurs une entreprise chinoise, China Harbour Engineering Company Ltd (CHEC) était retenue comme une candidate favorite pour remporter ce marché aux côtés du groupe français Bouygues (France) au dernier appel d’offres infructueux.
Au regard du positionnement géostratégique de la Tunisie au milieu de la Méditerranée et de son contrôle du détroit de Sicile, les Chinois, par le canal de leurs entreprises publiques, pourraient toujours opter pour la formule qui leur convient pour reprendre en main ce projet structurant.
A priori, ils ont de fortes chances de remporter ce marché pour peu qu’ils exploitent, à bon escient l’abandon de la Tunisie par le monde occidental dans ses négociations avec le FMI pour l’obtention de facilités de payement et le rapprochement, de plus en plus visible de Tunis, des capitales des pays du sud est asiatique.
Et pour être complet sur le sujet, un mot sur le projet. Situé à 100 kms de Tunis, à 40 kms de Sousse et à 170 kms de Sfax, le complexe du Port Enfidha, qui sera réalisé en partenariat public (60%) privé (40%), s’étend sur une superficie globale de 3.000 hectares dont 1.000 ha pour le seul port et le reste pour la zone économique et logistique avec une profondeur de 19 mètres. Il prévoit également un quai spécialisé dans le traitement des conteneurs dont la longueur est de 3.600 m, et un quai spécialisé pour les vracs avec une longueur de 1.400 m.
La capacité du port à la fin de la construction du projet sera de 5 millions de conteneurs EVP, et pour 4 millions de tonnes pour le trafic de vrac. Et pour reprendre les termes de Mme Zenzeri « le projet du port et de la zone logistique associée sera le premier port intelligent en Tunisie, conforme aux normes internationales ».