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Attayar et Echaâb accusés de « trahison » par Ennahdha
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Poussé par une minorité chez Tahya Tounès, Youssef Chahed aurait été, indirectement, responsable de l’échec
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Le pourquoi du forcing engagé par Jawhar Ben Mbarek pour la formation d’un gouvernement d’esprit révolutionnaire !…
Hier, samedi 21 décembre 2019, en fin de soirée, Habib Jemli, chef du gouvernement chargé, semblait trop confiant allant jusqu’à annoncer un échéancier clair et précis des futures étapes de la mise en place du gouvernement à former, et ce comme suit :
-Dimanche 22 décembre 2019 : Annonce définitive de la participation des quatre partis, Ennahdha, Attayar, Echaâb et Tahya Tounès, au gouvernement après la validation par leurs structures.
-En milieu de semaine prochaine : Annonce officielle de la composition ministérielle du gouvernement
-Fin de semaine et fin d’année 2019 : Soumission de l’équipe gouvernementale de M. Jemli au vote de confiance par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
Or, il y a un proverbe bien de chez nous qui dit dans une traduction texto: « Celui qui compte, tout seul, ne lui restera que ce qu’il a compté (إلي يحسب وحدو يفضلو).
En effet, toutes les donnes présentées par Habib Jemli sont tombées à l’eau suite au refus des structures officielles des différents partis en questions. Le Bureau politique d’Attayar, le Conseil national d’Echaâb ont rejeté les termes du consensus et ont confirmé leur non participation au futur gouvernement. Il en est de même pour Tahya Tounès malgré le forcing de Youssef Chahed, mais les positions fermes de certains de ses dirigeants, dont notamment Mabrouk Korchid, rejetant l’accord, ont fini par peser lourd dans la balance
Premières conséquences de cette évolution : Habib Jemli quitte Dar Dhiafa après avoir déclaré que « le futur gouvernement sera annoncé quand même en milieu de semaine prochaine dans le sens où il dispose d’autres plans de rechange, A, B et même C. On signale, ensuite, une réunion extraordinaire d’urgence du Bureau politique d’Ennahdha pour rechercher de nouveaux scénarios à la formation du futur cabinet gouvernemental.
Les raisons de ce nouveau blocage résident, selon les observateurs, dans plusieurs facteurs dont principalement l’absence de confiance entre le parti islamiste et ceux d’Attayar et d’Echaâb qui reprochent, entre autres, à Ennahdha de se cacher derrière M. Jemli qui tient à avoir la mainmise sur dix département ministériels pour lesquels il nommerait des personnalités présentées comme étant indépendantes, mais qui sont, en réalités, des « inféodées »au parti islamiste tout en rappelant les cas de Nadhir Ben Ammou et Noureddine Selmi …
Les premières réactions sont venues, bien évidemment, de M. Jemli qui s’entête à confirmer que le gouvernement sera annoncé officiellement au milieu de la semaine prochaine, alors que Zouhair Maghzaoui qui affirme qu’il n’y a jamais eu de consensus. « Au contraire, les propositions n’ont jamais été à la hauteur de nos attentes d’où l’accord quant à la nécessité de la validation finale par les structures des parties concernés… ».
Et d’ajouter que « notre retour aux rencontres avec M. Jemli s’est fait sur la demande de ce qu’on appelle les intermédiaires qui menaient des négociations avec des membres de nos partis respectifs… »
Et si Attayar s’est contenté d’un communiqué officiel, Ennahdha s’est pas manifesté par des statuts rendus publics sur Facebook. Noureddine Bhiri reproche aux deux partis Echaâb et Attayar d’avoir trahi la confiance de son parti, Yamina Zoghlami fait assumer l’échec du processus aux deux mêmes partis, alors qu’Abdelhamid Jelassi estime que Qalb Tounès pourrait participer au futur gouvernement
Et dire que Jawhar Ben Mbarek nous « promettait des révélations sur les péripéties de la réussite de la médiation, sachant que même si le nom de Habib Bouâjila est associé dans cette tractation, Ben Mbarek s’est toujours mis en avant face aux médias laissant entendre qu’il est l’architecte de la mise au point du dernier scénario, ce qui a fait dire aux milieux proches de Dar Dhiafa qu’il lorgne du poste de porte-parole du prochain gouvernement.
Et encore une fois, on s’interroge comment peut-on accorder ce titre de spécialiste en droit constitutionnel alors qu’il a enseigne le droit juste en tant que matière secondaire dans une école de commerce.
D’autre part, les analystes affirment que l’échec de cette formule a pour origine l’adhésion de Youssef Chahed qui est très loin de représenter l’esprit révolutionnaire auquel se targuent appartenir Attayar, Echaâb et Al Karama. D’ailleurs, ce dernier bloc a assuré qu’il ne votera pas la confiance au gouvernement qui en serait issu.
Autre point, Youssef Chahed n’a pas la caution de tout Tahya Tounès au sein duquel Mabrouk Korchid conduisait la partie contre la participation à la coalition gouvernementale, alors qu’une minorité menée par Salim Azzabi, qui voudrait le portefeuille du Commerce, poussait vers l’implication.
D’ailleurs, c’est un secret de polichinelle que de dire que le chef du gouvernement sortant fait des pieds et des mains pour rester au devant de la scène politique alors qu’au vu de son bilan négatif tout le long des trois ans et demi, il aurait dû s’éclipser et se faire oublier.
Ainsi, après avoir fait véhiculer qu’il était « bon » pour avoir le ministère des Affaires étrangères, ce scénario aurait capoté, certains allant jusqu’à évoquer que Kaïs Saïed ne le porte plus dans son cœur, d’où cette interview qu’il a veillé à faire clôturer par un éloge hors-pair envers le président de la République qui aurait été ressenti comme un message cherchant à être de service avec le chef de l’Etat.
En tout état de cause, la situation en Tunisie est préoccupante à tous points de vue, politique, social, économique et sécuritaire, mais Habib Jemli, apparemment faible de personnalité semble être sous la coupe d’Ennahdha qui semblent, tous les deux, complètement déconnectés dans la mesure où ils sont en train de faire du sur-place depuis quarante jours, ce qui peut conduire à une impasse aux conséquences ravageuses pour l’avenir pour le pays.
Noureddine HLOAUI