Tout un branle-bas a précédé la visite de l’héritier du trône saoudien Mohamed Ben Salman. Manifestations à l’Avenue Bourguiba, lettre de réprobation envoyée par le Syndicat national des journalistes tunisiens au Président BCE, levée de boucliers d’une frange de la société civile et de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme. Après l’assassinat de Kashoggi et son ignoble mutilation après avoir été vidé de son sang, le Prince ne peut pas avoir bonne presse. Il lui reste Trump pour le soutenir, moyennant une cascade de dollars. Et puis, n’oublions pas l’épuration ethnique dans les règles des Yéménites… Reste cependant que ses ennemis qataris et turcs, ne sont pas à proprement parler des colombes. Le drame syrien et la migration de nos jeunes pour rejoindre Daech est leur œuvre. Et, pourtant, Erdogan avait bien été reçu par BCE à Carthage et le dictateur turc s’y est démené comme s’il était chez lui, narguant du reste Mohamed Ennaceur et bon nombre parmi ses députés.
Quel bilan, quels dividendes découlent de cette visite de quelques heures ? Rien, si ce n’est le rituel côté diplomatique et le raffermissement des relations entre les deux pays. Reste à savoir ce que se sont dits BCE et MBS en privé : Ennahdha ferait une prière de plus pour le savoir. Ce qui est sûr, d’après la déclaration d’une source à Carthage à l’Agence TAP, ces deux milliards de dollars de dépôt dans les coffres de la BCT n’existent pas. Du reste, nous ne sommes pas l’Oncle Sam pour que l’Arabie casse la tirelire pour nous. Les Saoudiens ne donneront jamais rien à la Tunisie, tant qu’Ennahdha ne prend pas ses distances vis-à-vis d’Ankara et de Doha. En tous les cas, Bourguiba doit en avoir marre d’avoir toujours raison. Il ne voulait pas de la générosité des monarchies du Golfe, tandis que, lui emboitant le pas, Hassan II déclarait ceci sur les colonnes du Monde au lendemain de l’invasion du Koweit par l’Irak : « nous connaissons tous l’avarice péremptoire de nos amis du Golfe ». Au final, MBS à Tunis fait un pied de nez différemment médiatisé à Qatar, tandis que BCE en fait un à lui à « son frère Rached ».