TUNIS – UNIVERSNEWS (Urbanisme) – Nabeul, ville antique n’arrive pas à décoller. On a l’impression que la cité des Potiers s’est transformée petit à petit en une espèce de ville conçue pour abriter l’ennui. Nabeul est triste. On a beau essayer de repeindre les murs de la ville, d’égayer ses façades, la ville reste sombre, malgré sa sublime lumière. A-t-elle perdu le sens de la fête ? Même la mer, on ne la voit pas. On ne la voit plus. Est-ce que les gens qui se sont détournés d’elle ou est-ce elle qui s’est détournée de nous ? Nabeul est devenue un désert sans sable traversé par des ombres pressées. Un de mes voisins m’a parlé du mauvais état des routes, des embouteillages, de l’absence d’une propreté digne d’une ville de cette importance.
Mais pourquoi la ville a du mal à décoller ? Selon le directeur du Centre des Jeunes Dirigeants d’entreprise de la région, Haïthem Gouddi « Nabeul est confrontée à un phénomène de déclin économique. Les chiffres mettent en évidence une ville vidée de ses forces productives comme en témoigne le nombre des agriculteurs qui est passé de 1370 dans les années 70 à 400 actuellement, la réduction de 50% du nombre des établissements industriels, la fermeture de plusieurs unités hôtelières et l’augmentation du taux de chômage (16%)»
Et si on réinvente Nabeul !
Le mot « réinvention » est utilisé comme un slogan magique, répété à l’infini dans les discours politiques, dans les débats télévisés, et jusque dans les cafés populaires. Mais quand on gratte un peu, qu’est-ce qu’il signifie vraiment ? Des citoyens épuisés par des promesses non tenues, des élites qui, au lieu de se remettre en question, préfèrent rejeter la faute sur l’autre. Des paroles, des promesses, mais rarement des actes. Reconnaître nos failles et ne plus les cacher sous le tapis. Accepter que la réinvention d’une ville commence par une introspection collective. Ce n’est pas se lamenter sur notre passé, mais faire face aux faiblesses qui ont entravé notre progrès. Et ces faiblesses, si elles ne sont pas balayées, continueront d’entrer dans toute tentative de renouveau. Erij Messâadi, chercheuse au Laboratoire des Biomolécules, Venins et Applications Théranostiques (LBVAT) à l’institut Pasteur de Tunis a estimé que chaque dollar investi dans la Recherche et le développement (R-D) génère deux dollars en retour. Bien que ce taux varie, la R-D est un moteur important de la croissance économique des villes. « Les enjeux économiques et environnementaux imposent notamment de réduire la dépendance aux ressources naturelles non renouvelables. L’élargissement et la structuration des usages des bioressources offrent par exemple aux agriculteurs de Nabeul des perspectives intéressantes. Les végétaux terrestres, les algues, les animaux, les micro-organismes, les biodéchets produisent ou constituent des bioressources. Face aux nouvelles tendances alimentaires, à la diminution ou la prohibition de certains additifs et le poids de la sécurité alimentaire une forte tendance au retour vers les produits naturels est actuellement observée. Les bioressources naturelles constituent un immense gisement de composés importants au plan nutritionnel ou pharmacologique » explique-t-elle. Slim Zouari, ingénieur agricole, a précisé que l’’agriculture traditionnelle rencontre des défis croissants, en raison de la diminution des terres arables et de l’impact du changement climatique. L’eau se fait rare à cause de la faible pluviométrie. Un problème lié à notre agriculture consiste en la dégradation des sols, causée par l’érosion, l’utilisation des engrais chimiques et la présence de maladies dans le sol. Et c’est pour trouver une solution adaptée au problème lié à l’eau et au sol que l’hydroponie s’impose comme système de production hors-sol adapté à la culture des fruits, des légumes, des légumes à feuilles, des herbes médicinales, des plantes aromatiques. Elle est donc essentielle à la mise en place d’une agriculture durable dans les villes comme Nabeul.La plupart des structures hydroponiques sont verticales et occupent donc un espace réduit »
Nabeul, une smart city !
L’amélioration du cadre de vie et de l’environnement urbain est donc l’aspiration la plus forte des Nabeuliens. « Lorsqu’on leur demande de décrire la ville idéale, de façon spontanée, ils citent en premier lieu des éléments en lien avec l’amélioration de l’environnement local » précise Mohamed Jemaa, chercheur à la faculté des sciences. « Qualité et confort du logement, calme et sécurité sont les trois éléments les plus importants du cadre de vie actuel des nabeuliens, estime Slim Tlatli « La réinvention de la ville de Nabeul commence par interroger ces jeunes et étudier leurs aspirations et leurs besoins pour s’orienter dans le futur. «Il est important pour les étudiants de trouver un équilibre entre leur travail scolaire et leurs activités de loisir. Cette harmonie entre travail et détente contribue à leur bien-être et à leur réussite scolaire. C’est pourquoi ces jeunes ne veulent plus rester dans la capitale et préfèrent les villes moyennes comme Nabeul ou Sousse qui contribuent à leur bien-être et à leur réussite universitaire».
Le changement n’est pas un mirage, une destination lointaine. C’est un chemin quotidien. Et comme l’a annoncé Amor Khalef, le secrétaire général du club de Nabeul. « Nous, les Nabeuliens, nous sommes conscients que c’est à nous de jouer, nous avons une grande responsabilité dans l’édification de la ville de demain, nous avons le devoir de construire une ville nouvelle, de dynamiser l’économie locale, de revoir le plan d’aménagement, de promouvoir notre image et de nous internationaliser. Le mouvement est en marche. Nabeul de demain ne ressemblera certainement pas à celle d’hier. Nous devons certes garder notre identité. Nabeul de demain sera construit autrement tous les jours, par nous tous ». (M.S)