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Non au lynchage et au dénigrement des « bâtisseurs » !
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La famille destourienne et RCDiste devrait repartir à la conquête du pouvoir, sans peur ni reproche
Par Slaheddine Karoui*
Dans un statut rendu public sur sa page officielle Facebook, Slaheddine Karoui expose un condensé de des premiers jalons de la construction de la Tunisie, d’abord, par les destouriens, ensuite par les RCDistes tout en estimant que les choses ont changé après 2005 pour prendre une tournure biaisée jusqu’à nos jours.
La morale de l’histoire, pour Slaheddine Karoui, est les bâtisseurs de l’Etat moderne tunisien doivent être fiers de leur œuvre et qu’il est temps de se réconcilier avec leur passé malgré certaines défaillances et autres mauvaises actions commises. Voici, par ailleurs, le texte intégral, de cette réflexion :
« Ceux qui dénigrent le régime du Zaïm, ignorent que ceux qui servaient sous son régime travaillaient pour quelques dinars par mois (contremaîtres : 40 D T, pour les professeurs du secondaire : 58 D ; ingénieurs : 150 ; ministres : 225D ; président de la République 250 D ) et ce , pendant des années, dans des chantiers à créer, dans la poussière et sous la pluie, sans climatisation, par 45°C à l’ombre, sans eau potable– qu’il fallait aller chercher à 40 kms de leur domicile—sans frigos, ni yaourts, ni eau minérale, ni routes bitumées, ni double circulation, ni éclairage, la nuit, ni agences bancaires à moins de 140 kms à la ronde.
C’était l’époque où un gestionnaire devait encadrer 300 agents et un ingénieur contrôler 2000 ouvriers, sous la surveillance vigilante d’un syndicat dur et exigeant. Ces jeunes cadres, en majorité destouriens, étaient totalement inexpérimentés.
Cependant, il leur fallait apprendre très vite à faire fonctionner, ce qui existait et créer, construire et gérer ce qui n’existait pas encore, tout en se formant à la rédaction des procédures et des rapports, à la négociation des contrats, conventions et protocoles, ainsi qu’aux techniques de l’import/export, de la comptabilité, de la tenue des stocks, de la métrologie etc.
En sus, ils avaient la charge de former leurs collaborateurs. C’est dans ces circonstances, où, démunis de tout ou presque, ils devaient tout accomplir. C’était encore plus dur pour les serviteurs de la Tunisie des années 1956/1965, en raison de la défection de l’aide technique française, supprimée par le pouvoir français, pour punir le Zaïm d’abriter le QG de la résistance algérienne et d’avoir accéléré l’évacuation de Bizerte (1962) et la nationalisation des terres domaniales(1964).
C’est donc, dans ce néant des moyens financiers, de l’expertise technique et de la motivation matérielle que la Tunisie a été construite à force de labeur, de volonté, d’abnégation et de sacrifice des jeunes destouriens. Aussi, les dénigrer et les offenser, c’est outrager la mémoire de leurs aînés sacrifiés à l’autel de l’indépendance, injurier l’histoire, falsifier la vérité et semer le doute dans l’esprit des générations actuelles et montantes.
De 1956 à 1987, les générations qui se sont succédées, n’étaient pas indélicates, d’abord parce qu’elles étaient patriotes et indépendantistes et ensuite, parce qu’il n’y avait rien à voler. Tout l’argent que la Tunisie possédait en 1987, ce sont ces générations qui l’avaient produit, dinar après dinar, à force de travail et d’intelligence, pour le transformer en entreprises ( TUNIS-AIR, STEG, SONEDE, STIR…), banques(STB,BNA, BS…,) offices, écoles, collèges, lycées , hôpitaux, dispensaires, universités, routes, autoroutes, ponts, barrages, hôtels, villes etc.
S’il y eut des gens indélicats en Tunisie, il faut les chercher dans d’autres générations et à une autre époque, notamment, celle comprise entre 2005 et 2020. C’est pour dire aux survivants qui ont servi sous le régime des héros de l’indépendance, et à leurs enfants et petits-enfants, qu’ils ont des raisons objectives d’être fiers de leur contribution à l’édification de la Tunisie indépendante.
Destouriens, RCDistes et tous ceux qui ont posé une pierre dans l’édification de ce pays, en sont fiers, et à ce titre doivent traiter par le mépris, l’intense campagne psychologique d’intox et de lynchage, visant à leur faire peur, les culpabiliser et achever de les décourager, aux fins de les diviser et disperser, et engranger, ainsi des voix, à leurs dépens.
C’est pourquoi, ils doivent continuer de vaquer à leurs activités, sans crainte ni inquiétude, en cultivant l’idée qu’ils ont des raisons objectives d’être fiers d’avoir été les artisans de la construction de la Tunisie moderne de 1956 à 2010 et ce, surtout qu’ils n’ont rien à se reprocher.
Qu’au cours de cette période, des indélicatesses aient pu être commises par certains, c’est l’évidence même. Mais la raison et l’éthique interdisent, qu’on impute à 2 millions de personnes laborieuses et quasi-apolitiques, les crimes commis par quelques centaines d’individus cupides, égoïstes et irresponsables.
Que la famille destourienne assume donc son action ainsi que l’héritage de ses anciens avec fierté et assurance, mais aussi humilité et qu’elle ne se croit pas obligée d’aller en guerre contre tel ou tel parti politique afin de restaurer son honneur outragé et sa gloire d’antan.
Le pouvoir politique se gagne, se perd et se reconquiert, dans la lutte loyale et démocratique, au moyen des idées, programmes et projets. Telle doit être, le processus politique mental, de la famille moderniste.
En attendant, ses membres doivent opérer une double réconciliation : d’abord, chaque sympathisant destourien ou/et RCDiste, devrait se réconcilier avec lui-même et ses convictions. Ensuite, c’est toute la famille destourienne et RCDiste qui devrait se réconcilier pour surmonter les complexes défaitistes, dont l’adversaire l’a affublé avec habileté et repartir, ainsi, à la conquête du pouvoir, sans peur ni reproche, pour continuer leur oeuvre de bâtisseurs. »
* Docteur de spécialité de l’université de Nancy. Ex-PDG fondateur du Centre National de l’Informatique tunisien. Expert des entreprises et consultant formateur. A édité deux essais et cinq ouvrages techniques.