-
Un jeu des chaises musicales !!!
-
Des mesures « discriminatoires « qui s’appliquent aux autres types de commerce
TUNIS – UNIVERSNEWS L’évènement dans la grande distribution a été créé, ces derniers jours, par la tenue, le 14 juin 2024, de l’Assemblée générale de la doyenne de la grande distribution, la Société Magasin Général qui a été créée en 1883 par la Maison Bortoli Frères (France).
D’emblée, nous pouvons dire que les nouvelles révélées, lors de cette réunion, sont loin d’être bonnes. Le résultat est décevant. Il fait ressortir encore un déficit de 34 MD. Le déficit consolidé du groupe s’est aggravé, quant à lui, de 8%, passant de -39,2 MTND en 2022 à -42,4 millions de dinars à fin de décembre 2023. En fait, ces résultats ne sont pas surprenants. La Société MG a accusé des déficits récurrents depuis sa privatisation en 2007.
Conséquences d’une politique de croissance non contrôlée
A l’origine de cette contreperformance, les analystes évoquent « la politique de croissance effrénée financée par endettement bancaire (83 MD à fin 2023) ». D’après eux, ce financement a totalement déséquilibré la structure financière de l’entreprise allant jusqu’à remettre en cause sa pérennité.
Il n’est pas besoin de rappeler, dans le même contexte, que l’engagement bancaire de MG à fin 2023 reste élevé, 227 MD contre 303 MD à fin 2022.
Pis, cette baisse de l’engagement bancaire de 75 MD a été financée en partie par les fournisseurs (essentiellement des PME) dont l’encours auprès de MG a augmenté de 25 MD.
En outre, et selon les chiffres de nos confrères de Zone Bourse, MG a détruit 550 MD (de 640 à 91 MD de valorisation boursière) de valeurs entre 2019 et 2023.
Par-delà, ces résultats négatifs, l’Assemblée générale de la Société MG a été marqué par deux autres faits majeurs.
Le premier a consisté en le désengagement des Bayahi des postes de représentation légale. Abdelhamid Ben Ghazi préside désormais le Conseil d’administration en lieu et place de Tahar Bayahi, absent à l’étranger depuis un long moment et, Fahd Chaouch assure la direction générale à la place de l’inamovible Hédi Baccour.
Des dissensions entre propriétaires seraient à l’origine
Certains observateurs n’ont pas manqué de se demander si ce jeu de chaises musicales fait suite à la demande d’un administrateur indépendant, qui a brillé par son absence à cette assemblée générale et qui n’a pas renouvelé son mandat, de faire bénéficier l’ensemble des administrateurs d’une protection pénale ?
Le deuxième n’est autre que l’absence fort remarquée de Yahia Bayahi. Selon certaines indiscrétions du Conseil d’administration, des dissensions importantes auraient éclaté entre Yahya et Tahar sur la situation de l’entreprise et la voie de son redressement. Le benjamin des Bayahi, Taieb empêtré avec une ONG dans une affaire d’achat de passeport Chypriote, n’ayant aucun poids dans le Groupe se contentant d’un rôle protocolaire.
Morale de l’histoire : l’ambiance était morose et la défiance des uns vis-à-vis des autres était visible.
C’est peut-être à cause de cette morosité que rien n’a filtré sur le partenariat établi depuis, 2012, avec le distributeur français Auchan et sur les possibilités d’aide que ce dernier aurait pu apporter à MG pour se redresser.
Abstraction faite des problèmes dans lesquels la Société MG se débat, il faut reconnaître que depuis la pandémie Covid 19 (2020-2021), la grande distribution en Tunisie a été confrontée à de sérieuses difficultés générées par la baisse du pouvoir d’achat du citoyen tunisien et par des mesures administratives restrictives.
Il s’agit particulièrement de l’imposition d’un timbre fiscal de cent millimes sur chaque ticket de caisse des grandes surfaces, le pass sanitaire et la hausse des droits de douane des boissons alcoolisées importées lesquelles constituent une importante composante du chiffre d’affaires de la grande distribution.
Pour les économistes, avec ces mesures que les professionnels de la distribution qualifient de « discriminatoires » et d’«anticonstitutionnelles» dans la mesure où elles ne s’appliquent aux autres types de commerce, l’administration a déplacé le chiffre d’affaires de la grande distribution moderne vers le traditionnel avec comme corollaire : l’Etat va toucher moins d’impôts de la Grande distribution, ce qui va le priver de ressources régulières et pérennes.
La grande distribution demeure indispensable
Ces mêmes analystes estiment que depuis une vingtaine d’années, la grande distribution et surtout les grandes surfaces ont apporté beaucoup en matière de qualité et de sécurité alimentaire.
Elle a eu le grand mérite d’avoir accompagné les producteurs pour améliorer la qualité de leurs produits, pour accroître leur productivité et pour les aider à aller chercher la qualité du produit final et exporter.
C’est pour cette raison, dans l’intérêt général, la Société MG gagnerait soit à être redressée par ses propriétaires soit à être cédée à un partenaire stratégique. Pour le moment, on n’est pas, semble- t-il- encore à ce stade.
Khemaies KRIMI