Incident-Nouvelair-Nice: Éric Ciotti ou… l’art de dramatiser l’aviation!!!

Tunis, UNIVERSNEWS (NAT) – L’incident survenu à l’aéroport de Nice le 21 septembre dernier a suffi pour transformer un fait technique, maîtrisé par les procédures de sécurité, en polémique politique. Un Airbus A320 de Nouvelair, compagnie tunisienne opérant depuis plus de trente ans en Europe, a brièvement confondu les pistes avant d’effectuer une remise de gaz impeccable. Fin de l’histoire ?

Pas pour tout le monde. La récupération politique d’un incident maîtrisé, c’est ce qu’a fait Éric Ciotti, député, président de la commission des finances du département des Alpes-Maritimes.  Au lieu d’attendre les conclusions du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA), seule habilité à déterminer les causes réelles, Éric Ciotti a choisi la voie la plus rapide : écrire au Premier ministre pour demander la suspension pure et simple de Nouvelair en France. Dans son courrier, il parle d’«incident d’une gravité extrême», mettant en doute «le sérieux et la fiabilité» de la compagnie tunisienne.

Soyons clairs : si l’incident avait été si extrême, il n’y aurait pas eu de remise de gaz réussie, mais un accident. Les faits sont têtus : il n’y a eu ni blessés, ni dégâts, ni collision. Oui, il y a eu erreur s’agissant de la piste d’atterrissage, mais il y a aussi une tour de contrôle censée anticiper et prévenir pareilles erreurs !

Les pilotes tunisiens : une réputation sans tâche à l’international

 S’acharner sur Nouvelair revient aussi à oublier une réalité largement reconnue : les pilotes tunisiens figurent parmi les mieux formés et les plus compétents du bassin méditerranéen. Nombre d’entre eux volent pour les grandes compagnies internationales. Leur rigueur et leur professionnalisme sont cités en exemple. Cet épisode ne doit pas occulter des décennies de sécurité, ni laisser croire qu’une erreur d’alignement — rare mais possible dans tout grand aéroport doté de pistes parallèles — soit le signe d’une faillite systémique.

Quand la peur sert de levier politique

 Éric Ciotti n’en est pas à son premier coup d’éclat sécuritaire. Cette fois, il choisit de faire de Nouvelair un symbole, au risque de stigmatiser une compagnie et, par ricochet, un pays partenaire. Or, la sécurité aérienne se construit sur des enquêtes techniques, pas sur des déclarations à l’emporte-pièce. La manœuvre politicienne est transparente : brandir la peur, invoquer le « principe de précaution », réclamer des sanctions immédiates. Mais la peur ne doit pas dicter la gestion d’un secteur aussi exigeant que l’aéronautique.

Un incident, pas une catastrophe

Ce que l’on oublie souvent de dire, c’est que la remise de gaz fait partie intégrante des procédures normales de sécurité. Elle est enseignée, répétée et attendue. L’équipage de Nouvelair a agi exactement comme il devait le faire : détecter l’anomalie, corriger, sécuriser. Voilà la preuve de leur compétence, pas de leur défaillance.

Défendre le sérieux sans céder à la dramatisation

L’aviation est un domaine où l’émotion ne doit pas supplanter la raison. En exigeant l’exclusion de Nouvelair du ciel français, Éric Ciotti dépasse la prudence et verse dans la dramatisation. Son courrier affaiblit injustement la réputation d’une compagnie qui transporte chaque année des centaines de milliers de passagers entre la Tunisie et la France, sans incidents majeurs.

La question n’est pas de protéger Nouvelair par patriotisme ou indulgence, mais de défendre une vérité : la sécurité aérienne ne se décrète pas dans une lettre politique, elle s’établit dans les cockpits, les tours de contrôle, et les rapports techniques.

Au lieu de jeter l’opprobre sur Nouvelair et ses pilotes, il serait plus sage d’attendre les conclusions de l’enquête et, le cas échéant, d’améliorer les procédures là où cela est nécessaire. L’incident de Nice n’est pas un scandale : c’est un rappel que le risque zéro n’existe pas, mais que le professionnalisme des équipages permet d’éviter qu’un incident ne devienne accident. En voulant transformer un fait maîtrisé en catastrophe nationale, Éric Ciotti se trompe de piste.

Amel Ben Mahmoud

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