Dans un statut rendu public sur sa page Facebook, Hakim Tounsi s’élève contre les tiraillements politiques inutiles et appelle à la construction et à faire preuve d’esprit positif loin des polémiques tout en prônant une attitude moderniste, progressiste et démocratique.
Vu la pertinence de cette réflexion, nous la reproduisons dans son intégralité :
«Une guerre sévit en Tunisie depuis la révolution de 2011 entre une poignée de politiciens en totale déconnexion d’une majorité silencieuse de tunisiens qui n’arrive plus à suivre et qui ne partage en aucun cas un désir de confrontation ni d’alignement ni pour l’un, ni pour l’autre des belligérants !
La Révolution en 2011 de la société tunisienne et de sa jeunesse, qui ont toujours été tenues à l’écart de la politique et du pouvoir, n’a jamais réclamé autre chose que le Travail, la Liberté et la Dignité. Cette Révolution, confisquée par cette minorité de politiciens qui accaparent la scène politique depuis 10 ans, n’a jamais réclamé une confrontation entre les Islamistes et les Laïcs, ni un retour vers le Califat.
La laïcité de l’Etat garantit que le toit de la maison soit suffisamment haut pour accueillir toutes les Mosquées, les Eglises et les Synagogues dans le respect mutuel et sans aucun avantage pour qui que ce soit avec des lois valables pour tous qui respectent la liberté du culte y compris pour ceux qui choisissent de n’avoir aucune croyance ni religions.
La laïcité de l’Etat garantit l’égalité devant la loi de tous les citoyens quelle que soit leur origine ethnique, leur couleur de peau ou leur région de résidence.
Pour cela, la laïcité de l’Etat et de ses Institutions est un progrès souhaitable garantissant la paix et la cohabitation intelligente des peuples. Plusieurs sociétés dans le monde ont beaucoup milité pour rompre avec les guerres de religions et séparer le culte de la politique.
A l’époque de la dynastie Abasside (750 à 1258) qui a atteint en Orient son apogée au 9ième siècle sous Hâroun ar-Rachîd, le grand philosophe et poète arabe Abu Al-Ala Al-Maari أبو العلاء المعري n’avait il pas vanté la tolérance et la cohabitation pacifique des religions comme signe de l’essor de la ville syrienne de Lattaquié اللاذقية en écrivant :
“في اللاذقية ضجة ما بين أحمد والــــمسيحُ
هذا بناقوس يدق وذا بمئذنة يــــــــــــصيحُ
كلٌ يعظِّم دنيه يا ليت شعري ما الصحيحُ ؟”
أبو العلاء المعري
«À Lattaquié, il y a une agitation entre Ahmed et le Christ
L’un avec une cloche qui bat,
L’autre du haut d’un minaret qui crie
Chacun fait l’éloge de sa religion,
Dieu, qui d’entre eux dit la vérité ? »
Donc la cohabitation pacifique et intelligente qui garantit la liberté du culte ne serait pas une première en terre d’Islam. Sous le règne du grand Hâroun ar-Rachîd il y avait autant de musulmans que de chrétiens dans la prospère ville de Lattaquié اللاذقية en Syrie.
Aujourd’hui en Tunisie, nous avons besoin de puiser dans la sagesse de notre culture pour ne pas aller dans la confrontation bilatérale haineuse et destructrice qu’on nous propose. Nous avons besoin de nos sages, de leur calme et de leur recul pour éviter ces tensions qui dominent la vie politique sous le dôme du parlement des représentants du peuple et qui ne mèneront que vers l’impasse, la ruine et la destruction du pays, de son économie et de ses institutions.
Nous avons besoin de nos personnalités tunisiennes, femmes et hommes, pour convaincre nos politiciens qu’il y a de la place pour tout le monde et que la tolérance est la clé de cette étape pour la bonne cohabitation et le progrès.
La confrontation, la haine et l’exclusion de quelle que partie politique que ce soit, l’usage de la force, n’auront aucun avenir et ne sortiront aucun gagnant car le peuple est suffisamment émancipé et n’acceptera jamais un retour en arrière.
La Constitution tunisienne de 2014 est sur le papier l’une des meilleures constitutions jamais élaborées. Respectons ses enseignements et ses prescriptions pour construire la Tunisie de demain au lieu de tirer chacun vers soi mais toujours vers des schémas et des scénarios du passé qu’il soit proche ou plus lointain. Il est plus que temps de réaliser une véritable réconciliation, d’enterrer la hache de guerre et d’ouvrir une nouvelle page pour cette Tunisie qui le mérite tant.
Vive la Tunisie Plurielle, Émancipée, Tolérante, Progressiste et Ouverte sur le reste du Monde.»
Hakim Tounsi