Jeudi dernier, 23 décembre 2021, jour de la réunion du Conseil des ministres, on s’attendait à ce que le chef de l’Etat, qui présidait ledit Conseil, fasse une présentation avec force détail du projet de loi des finances et de budget économique 2022
Mais, tout le monde a été « dribblé » puisque le président de la République s’est contenté de nous dire que le Conseil a adopté les deux projets malgré les contraintes sans fournir le moindre chiffre, sachant, soit dit en passant, que la loi des finances n’a pas été publiée sur le Journal officiel de la République Tunisienne (JORT)
Or, Kaïs Saïed nous a parlé d’un autre projet, celui de l’existence d’un projet d’assassinat de responsables tout en étayant sa révélation par des données « concrètes » à savoir la détection d’une communication téléphonique évoquant ce complot dont la date a été même fournie au cours de cette communication dont le contenu a été entendu par le ministre de l’Intérieur, Taoufik Charfeddine.
D’ailleurs, devant l’ampleur des réactions exprimées haut et fort par plusieurs personnalités nationales, le ministère public a vite fait d’annoncer l’ouverture d’une enquête officielle à ce sujet.
Il faut dire que ce n’est pas la première fois que le locataire du Palais de Carthage fait état de la découverte d’un complot d’assassinat visant sa personne. Et à chaque fois, on a abouti à un simple « pétard mouillé » dans la mesure où le parquet conclut les investigations par le « classement de l’affaire faute de preuves ».
En août 2020, une enquête avait été ouverte suite à un rapport réalisé sur la base d’informations fournies par un individu qui a affirmé avoir été approché pour mettre du poison dans le pain de la boulangerie qui fournit le palais présidentiel.
Mais un communiqué du ministère de la Justice, en date du 24 juin 2021, indiquait que le dossier a « été classé faute de preuves »
Ensuite, c’est au tour de l’affaire dite du « courrier empoisonné » de faire son apparition. Et c’est le cabinet présidentiel ; lui-même, qui a donné des éléments détaillés, par le biais d’un communiqué rendu public sur la page officielle Facebook de la présidence de la République.
« Un courrier ne portant pas le nom de l’expéditeur a été envoyé à la présidence de la République le 25 janvier 2021. La cheffe de cabinet, Nadia Akacha l’a ouvert et a trouvé une enveloppe vide. Cependant, son état de santé s’est dégradé dès l’ouverture du courrier. Elle s’est évanouie et elle a pratiquement perdu la vue, en plus d’une forte migraine », lit-on dans ce communiqué.
La présidence note, également, qu’un autre employé du cabinet était présent et avait eu les mêmes symptômes, mais amoindris. Et d’ajouter que la cheffe de cabinet a été transférée à l’hôpital militaire pour effectuer le diagnostic nécessaire afin de déterminer les causes derrière son malaise».
Et c’est le jeunot, Riadh Jrad, qui est venu sur le plateau d’Attessiâ donner exactement la même version. Mais, depuis plus rien. Ce qui constitue une véritable honte dans le sens où la présidence de la République faisait état de messages de dirigeants de pays frères amis pour s’enquérir de l’état de santé du chef de l’Etat !
Pour revenir à ce Ryadh Jrad, rappelons qu’il était le « fondateur, en 2018, du mouvement des gilets rouges qui oeuvrait pour la chute du gouvernement de Youssef Chahed tout en courtisant le défunt président Beji Caïd Essebsi en appelant, déjà, au changement du système politique en présidentiel » !…Un épisode dont le jeunot Jrad ne parle et n’évoque plus.
Ce n’est pas tout, les discours du président de la République sont souvent émaillés d’allusions de ce genre. «Celui qui veut le dialogue ne se rend pas secrètement à l’étranger cherchant tous les moyens pour la destitution du Président de la République, même par assassinat », lisait-on.
Des propos tenus pas le chef de l’Etat le 20 août 2021 versent dans le même sens : « Je n’ai peur que de Dieu le tout Puissant. Ils envisagent le meurtre et le bain de sang mais si je meurs aujourd’hui ou bien demain, je mourrai en martyr ».
Et il y a à peine deux mois, le ministère public près le Tribunal de première instance de Sousse a ordonné le placement d’un homme ayant appelé à l’assassinat du président de la République sur la liste des personnes recherchées.
Le ministère public précise, encore, que l’individu en question avait diffusé une vidéo sur Facebook dans laquelle il appelait les forces de la police ou de l’armée à assassiner Kaïs Saïed, tout en affirmant que la justice tunisienne est parvenue à identifier l’auteur de la vidéo. Pourtant, jusqu’au jour d’aujourd’hui, le pouvoir ne nous a pas fourni l’identité de cette personne !
Quant à la toute dernière révélation, les observateurs sont unanimes à réclamer des précisions quant aux auteurs et à la teneur de la conversation téléphonique incriminée tout en éclairant l’opinion publique sur les circonstances de l’interception téléphonique : s’agit-il d’une écoute dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou d’une écoute sélective concernant certains opposants politiques ?
Et tout état de cause, il est inadmissible, voire aberrant qu’on fasse vivre les Tunisiens dans la terreur et la hantise d’un assassinat sans qu’on ait un minimum de détails sur la nature du crime à commettre, ses auteurs présumés, ses commanditaires…
Car il est inadmissible qu’à chaque fois que le président de la République n’a rien à dire de concret –comme c’est le cas la plupart du temps- il lance au bon petit peuple, rabaissé au rang de sujet, une petite « bombe » à propos d’un éventuel assassinat de sa propre personne pour que l’opinion publique trouve matière à mâcher, plusieurs semaines durant !…
Noureddine HLAOUI