
- La première vague de cette réforme concerne les grandes entreprises en relation avec l’État et les sociétés opérant dans la distribution de médicaments et d’hydrocarbures
- L’objectif affiché est simple : tracer les transactions, croiser les flux et éliminer les zones d’ombre
- La réforme impose une refonte des systèmes d’information comptable et oblige à se doter d’outils compatibles avec TTN et à instaurer des contrôles internes robustes
- Le virage numérique s’accompagne encore d’une phase de transition hybride, où le formalisme administratif et la traçabilité physique doivent coexister
TUNIS-UNIVERSNEWS- (SEF) – À compter du 1er juillet 2025, la Tunisie amorce un tournant fiscal décisif avec la mise en œuvre de l’article 71 de la Loi de finances n°2024-77, instaurant l’obligation de facturation électronique pour un ensemble de secteurs économiques jugés stratégiques. Si cette réforme peut sembler technique, sa portée économique, fiscale et même sociétale est majeure.
Une mesure ciblée… pour le moment
La première vague de cette réforme concerne :
- Les grandes entreprises en relation avec l’État, les établissements publics ou les collectivités locales ;
- Les sociétés opérant dans la distribution de médicaments et d’hydrocarbures (hors commerce de détail).
Concrètement, les factures papier ou générées en dehors de la plateforme Tunisie TradeNet (TTN) seront désormais irrecevables fiscalement. L’objectif affiché est simple : tracer les transactions, croiser les flux et éliminer les zones d’ombre.
Une réforme à la fois dissuasive et structurante
Le nouveau cadre juridique prévoit une gradation des sanctions :
- 100 à 500 dinars par facture non conforme,
- 250 à 10.000 dinars si les éléments obligatoires (TVA, prix, client…) sont absents,
- Et, dans les cas graves, des sanctions pénales pouvant aller jusqu’à la privation de liberté.
Au-delà de l’aspect coercitif, la réforme impose une refonte des systèmes d’information comptable et oblige les entreprises à se doter d’outils compatibles avec TTN, à former leurs équipes, et à instaurer des contrôles internes robustes.
- Logistique et conformité : la vigilance reste de mise
Même dans un cadre 100 % numérique, la copie papier de la facture électronique ou du bon de livraison reste obligatoire lors du transport de marchandises. Son absence expose l’entreprise à une amende de 20 % de la valeur transportée, avec un minimum de 500 dinars.
Cette exigence montre que le virage numérique s’accompagne encore d’une phase de transition hybride, où le formalisme administratif et la traçabilité physique doivent coexister.
Une réforme à fort potentiel stratégique
La facturation électronique est bien plus qu’un simple outil fiscal. Elle porte en elle des enjeux macroéconomiques majeurs :

Quelles perspectives pour 2026 et au-delà ?
Ce dispositif est conçu comme une première étape vers la généralisation à l’ensemble du tissu économique tunisien. À moyen terme, toutes les entreprises, y compris les PME et professions libérales, devront s’y conformer. C’est la condition pour espérer :
- Un système fiscal plus juste,
- Une administration plus efficace,
- Et un changement de culture économique.
Conclusion : entre nécessité et opportunité
La réforme de la facturation électronique, dans sa rigueur, vient combler une lacune structurelle de la gouvernance économique tunisienne. Elle constitue un outil puissant de transparence et de traçabilité, mais aussi un test de maturité pour les entreprises et les institutions.
Son succès dépendra de l’équilibre entre :
- La fermeté de l’État dans l’application des sanctions,
- Et sa capacité à accompagner le secteur privé dans cette transformation numérique.
Il ne s’agit plus simplement de “numériser la facture”, mais de reconstruire la confiance dans le système fiscal.