
TUNIS-UNIVERSNEWS- (MONDE) – Pour faire pression sur Israël et ses alliés occidentaux, la République islamique n’exclut pas de fermer le détroit d’Ormuz. Situé entre l’Iran et le sultanat d’Oman, ce point de passage est stratégique pour le transport pétrolier mondial
Depuis que l’armée israélienne a attaqué, dimanche 15 juin, le champ gazier de South Pars, proche d’Ormuz, les appels à la fermeture du détroit fusent en Iran. Le député conservateur Sardar Esmail Kowsari assure à la presse de la République islamique que cette fermeture « est à l’étude ». Tandis que son homologue religieux Hamid Rasaee exige, en pleine session parlementaire, de « restreindre le trafic maritime d’Ormuz ».
Jeudi dernier, le 12 juin, le cours du Brent, le pétrole brut qui fait référence, affichait environ 70 dollars le baril. Ce cours a grimpé pour avoisiner 78 dollars vendredi et tournait autour des 75 dollars en ce début de semaine en tendant à se stabiliser entre 71 et 72 dollars en fin de journée, lundi. Il n’y a pas encore de quoi s’affoler, car on est encore loin des 100 dollars le baril. Toutefois, l’importance stratégique du détroit d’Ormuz et la menace que l’Iran fait planer sur cette zone, mérite qu’on s’y intéresse.
Un couloir entre l’Iran et Oman
C’est une courbe étroite, entre les îles du sud de l’Iran et une pointe au nord du Sultanat d’Oman. Elle permet de faire la jonction entre, d’une part la Mer d’Oman et l’Océan Indien et, d’autre part, au nord, le Golfe Persique. Une cinquantaine de kilomètres séparent l’Iran du Sultanat d’Oman à cet endroit. Pour les Etats qui bordent le Golfe, soit l’Irak, le Koweït, le Qatar, les Emirats-Arabe-Unis, Bahreïn, l’Arabie saoudite et l’Iran, le détroit d’Ormuz est un point de passage obligé pour écouler le pétrole et le gaz.
C’est aussi par cet endroit que transitent les nombreux cargos qui approvisionnent les pays du Golfe. « C’est vraiment un point stratégique pour les énergies fossiles au niveau mondial, on estime environ qu’un cinquième du pétrole, donc 20% du pétrole, transite par le détroit d’Ormuz », explique Adel El Gammal, professeur de géopolitique de l’énergie à l’ULB. « Et pour le gaz, on est plutôt à un tiers du gaz naturel liquéfié et, à peu près, à 30 ou 35% du GNL (ndlr, gaz naturel liquéfié) qui transite par le détroit », ajoute le professeur El Gammal.
Dans ce détroit d’Ormuz, le trafic fluvial est particulièrement dense. Les porte-conteneurs et les tankers y circulent sur deux « rails », l’un montant et l’autre descendant, d’une largeur de 3.5 km.
La menace iranienne sur le détroit réelle ou pas ?
Si le marché mondial du pétrole s’agite actuellement, c’est parce qu’il craint que l’Iran s’en prenne à la circulation des navires dans le détroit d’Ormuz. Le régime de Téhéran a en effet averti qu’il pourrait fermer le détroit, même si cette menace, déjà brandie dans le passé, n’a jamais été mise à exécution.
L’Iran a, en effet, au moins autant à y perdre qu’à y gagner. « Le détroit d’Ormuz est crucial pour tout le monde, ce serait suicidaire pour l’Iran de le bloquer », estime Samuele Furfari, professeur émérite à l’ULB et spécialiste de la géopolitique de l’énergie. « S’ils le font, ils vont se mettre à dos la Chine qui est leur principal client », ajoute cet expert. Depuis que des sanctions internationales frappent l’Iran, ce pays a été contraint de réduire sa production de pétrole. Ce qu’il parvient encore à exporter est acheté principalement par la Chine. D’ailleurs, plus largement, le pétrole produit dans la région du golfe alimente davantage l’Asie que le reste du monde. « L’Iran ne peut donc pas se mettre à dos non seulement la Chine, mais aussi l’Inde, le Japon et tous les autres », estime Samuele Furfari.