Tawfik BOURGOU
TUNIS – UNIVERSNEWS – A proximité directe du point le plus au sud de sa frontière avec le Mali, l’Algérie est train de rassembler des groupes d’immigrés clandestins subsahariens en prévision de les pousser vers la Tunisie et donc dans l’espoir de faire submerger l’Europe via la Tunisie. Les images et les vidéos parlent d’elles-mêmes. C’est un danger imminent pour la Tunisie, tandis que les autorités et la population regardent ailleurs comme si l’affaire concernait un pays étranger. Un déni et une nonchalance qui vont coûter un pays.
De récents rapports et analyses soulignent que la débâcle militaire de l’armée malienne et des éléments de l’ancienne milice Wagner à proximité directe de la frontière algérienne et la reprise du territoire par des éléments Touaregs et islamistes est de nature à rebattre les cartes d’Alger dans l’espace sahélo-saharien.
Ostensiblement, les éléments rebelles du nord Mali ont exhibé le drapeau ukrainien et proposé de transférer au profit de l’Ukraine les prisonniers russes appréhendé lors de la débâcle russo-malienne à laquelle un apport logistique ukrainien et occidental n’est pas étranger afin d’étrangler toute extension russe en Afrique du Nord.
Parallèlement, l’alignement de Paris sur Rabat dans le dossier du Sahara Marocain, considéré à tort par Alger comme un pays indépendant, crée une tension entre Paris et Alger et achève d’absorber l’Afrique du nord dans les tensions est-européenne comme nous l’avions prévu il y a environ six mois dans Universnews.
C’est dans l’entrecroisement de ces multiples fils qu’il faut désormais comprendre le rôle d’Alger à Tunis même, notamment à travers son action à peine voilée de transferts massifs, continus de subsahariens vers le territoire tunisien avec le secret espoir de faire écrouler la Tunisie et bien sûr de susciter une crise migratoire en Europe du sud.
Cette action devait soulager Moscou et desserrer l’étreinte contre Alger en amenant les pays européens à re-inclure Alger dans un vaste plan de règlement des problèmes africains non seulement ceux liés à l’espace sahélo-sahariens, mais aussi le Sahara Marocain et surtout en posant la Tunisie comme un des « territoires » que l’Algérie s’estime en droit de réclamer et d’obtenir comme une sorte de prébende. Ce plan « global » avait été discuté partiellement par Alger avec Meloni qui a accepté le principe d’un condominium italo-algérien sur la Tunisie en contrepartie du gaz algérien.
Un accord tacite avec l’Algérie sur la Libye et une mansuétude quant aux accords possibles de la cheffe de gouvernement italien au Tchad en lieu et place d’une France en recul de partout devaient compléter le tableau.
Malgré la visite du ministre tunisien de l’intérieur à Alger et l’affirmation de Kais Saïed, pour la énième fois, de l’avenir commun tuniso-algérien (ce que nous contestons bien sûr), et bien que le président sortant tunisien soit le candidat le plus algéro-compatible, il semble qu’Alger dans ses multiples bras de fer avec Rabat, Paris et en arrière-plan Washington, a décidé de vassaliser encore plus la Tunisie pour s’éviter un encerclement définitif, quitte à détruire la Tunisie et à rendre ingérable le pays pour le président sortant pourtant arcbouté sur son crédo arabiste et pro-algérien.
La recrudescence des passages de subsahariens par la frontière tuniso-algérienne ces dernières semaines montrent que les autorités algériennes font peu cas de la possible implosion de la Tunisie.
La crise au nord Mali et la défaite russe dans l’espace sahélien, conjuguées avec l’avantage diplomatique du Maroc qui a réussi à s’assurer l’accord de trois des cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies, avec peut-être une neutralité chinoise, dans le dossier du Sahara, rend la situation d’Alger intenable et ce à proximité du plébiscite de Tebboune pour un mandat supplémentaire à la tête de l’Algérie.
Alger n’a que très peu de cartes à sa disposition pour faire pression sur l’Europe et sur Paris. Alger ne contribue qu’à hauteur de 8% des consommations de gaz en France, certes l’Italie est liée à Alger via Tunis, mais Rome est en rivalité avec Paris, sur tous les plans en Afrique du Nord et donc Alger ne peut pas tout tenter.
Il ne reste désormais pour Alger que l’immigration subsaharienne via la Tunisie. Alger sait que les subsahariens débarquant en Italie se destinent essentiellement pour implantation en France. Alger espère aussi qu’une vassalisation totale de la Tunisie à son avantage, pourrait créer de nouvelles conditions contraignant l’Europe et les Etats-Unis à des négociations qui seraient défavorables à Rabat.
Mais pour l’heure, dans ces jeux à multiples bandes, la Tunisie se trouve otage d’un jeu d’axes dans lequel le pays s’est empêtré par la faute de ses gouvernants et leur ignorance des jeux stratégiques dans l’espace méditerranéen et sahélo-sahariens. Plus grave encore, le peuple tunisien risque de payer non seulement l’amateurisme de ses dirigeants, la nonchalance sécuritaire sur les frontières, la faute stratégique d’avoir signé un accord avec l’Italie qui est un « baiser de la mort » pour le pays.
Il payera aussi sa propre mansuétude vis-à-vis des mafias qui ont importé et importent chaque jour un peu plus des populations étrangères qui deviennent un outil de chantage contre la Tunisie, contre l’Europe et qui sont le cheval de Troie de toutes les ingérences dans les affaires du pays.
Le pire est que la Tunisie est aujourd’hui sans aucun allié, totalement isolée, sans aide face à ce qui constitue le pire danger existentiel qu’elle a à endurer.
T.B.
Politologue