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Un manque à gagner de 150 Millions de dinars et une baisse considérable au niveau de la croissance réalisé par l’ensemble du secteur bancaire
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La solidité des banques tunisiennes en termes de solvabilité et de respect des normes de base demeure encore faible et sous-capitalisée par rapport aux normes internationales
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La possibilité de bénéficier d’une révision des taux sur certains crédits à taux fixe affaiblira les bénéfices nets des dix plus grandes banques tunisiennes d’environ 170 MDT en 2025
Tunis, UNIVERSNEWS (SEF) – Le professeur et expert en économie, Moez Hadidane a averti contre les nouvelles réglementations imposées sur les banques tunisiennes. Dans une déclaration, ce jeudi 13 Mars 2025 à Universnews, il a souligné que les récentes mesures entraineront un manque à gagner de 150 Millions de dinars, soit une chute de moitié et une baisse considérable au niveau de la croissance réalisé par l’ensemble du secteur bancaire.
Le rapport de Fitch est réaliste
Il a par ailleurs évoqué trois grandes mesures. La première est celle qui oblige les banques à réduire les taux d’intérêt fixes appliqués aux crédits en cours de remboursement ou aux nouveaux crédits dont la durée initiale de remboursement est supérieure à 7 ans, s’il s’avéré que la valeur totale des intérêts contractuels payés par le client au cours des trois années précédant la date de la demande de réduction dépassent 8 % de l’encours du capital restant dû.
La deuxième mesure est celle d’obliger les banques à allouer au moins 8 % de leurs bénéfices annuels pour la création de lignes de financement de microcrédits honorifiques à court terme ne dépassant pas deux ans, avec des conditions facilitées sans intérêts ni garanties. Par rapport à cette mesure, Hadidane a assuré que le risque de perte sera très grand par rapport cette mesure, avant d’expliquer que non seulement la banque ne prend pas de commissions mais aussi il y a une forte probabilité de ne pas être payée même au niveau de la principale du crédit.
La troisième mesure qui aura également un impact sur la rentabilité des banques concerne le plafonnement des commissions bancaires bien que son entrée en application ne sera effective qu’après la publication d’un décret d’application, selon les déclarations de Hadidane.
Les banques tunisiennes sont loin des normes internationales
Face à ces trois nouvelles réglementations, l’expert en économie a qualifié de réaliste le rapport de Fitch Rating sur la rentabilité des banques tunisiennes, avant d’estimer que l’impact sera significatif sur la marge bénéficiaire et par conséquent sur la rentabilité.
Hadidane a tenu en outre à préciser que ces mesures ont un aspect social parce qu’en Tunisie, nous considérons toujours que les banques tunisiennes gagnent beaucoup d’argent alors qu’en réalité la rentabilité des banques tunisiennes reste faible par rapport aux banques africaines : « Pour nous, en Tunisie, le secteur bancaire est solide et réalise d’énormes bénéfices donc il doit contribuer à l’économie et assume une partie du fardeau social. Or, la solidité des banques tunisiennes en termes de solvabilité et de respect des normes de base demeure encore faible et sous-capitalisée par rapport aux normes internationales et cela a été déjà confirmé par Fitch Rating qui a voulu dire, entre autres, que les banques tunisiennes sont encore loin des normes internationales, coté rentabilité et bénéfices réalisées et qu’elles ne sont pas solides aussi », a-t-il déclaré.
Le bénéfice des 10 premières banques régresse de 14%
Il convient de rappeler à ce propos, que dans son dernier rapport sur les nouvelles mesures imposées par le législateur sur les banques tunisiennes, Fitch Rating a annoncé que la rentabilité des banques tunisiennes fait face à des pressions accrues en raison de la nouvelle réglementation sur les prêts qui permet une réduction des taux d’intérêt sur certains emprunts.
Fitch Ratings a également estimé que la possibilité offerte aux emprunteurs de bénéficier d’une révision des taux sur certains crédits à taux fixe affaiblira les bénéfices nets des dix plus grandes banques tunisiennes d’environ 170 MDT en 2025. Ce montant représente 11% de leurs bénéfices nets annualisés au premier semestre 2024, avec des effets qui pourraient s’étaler sur plusieurs années.
L’agence a aussi mentionné l’entrée en vigueur prochaine d’une mesure permettant aux PME d’accéder à des prêts sans intérêt, représentant 8% des bénéfices nets des banques en 2024. Cette mesure coûtera environ 50 MDT aux dix principales banques, soit 3% de leur bénéfice net du premier semestre 2024.
Selon Fitch, ces deux mesures combinées devraient réduire les bénéfices nets des dix premières banques tunisiennes de 14% en 2025. Si cela ne devait pas affecter leurs notations, leur rentabilité serait mise sous pression. Fitch Ratings considère d’ailleurs que le rendement des fonds propres des banques demeure faible.