Près de sept ans après sa fondation et plus de quatre ans après sa victoire aux élections législatives et présidentielle de 2014, le parti de Nidaa Tounès, créé du néant par Béji Caïd Essebsi, a fini, par tenir son congrès électif. Mais que d’eau a coulé sous les ponts durant ces quatre ans où le fils du fondateur, a tout manigancé pour faire le vide autour de lui.
Mais le fiston a, surtout, détruit, ou presque, le mouvement avec une multiplication des fissures pour la simple raison qu’il n’avait ni envergure, ni compétence, ni charisme, ni idées, ni projets… Rien de rien. Le seul atout dont il disposait et qu’il croyait suffisant, pour garder les clefs de la « boutique », d’être le fils du fondateur et président.
En l’espace de plus de six ans, HCE, n’a présidé aucun meeting, n’a participé à aucun plateau ou débat, n’a été l’invité à aucun émission, même en solo, n’a donné aucune déclaration digne de ce nom. Bref, à part la fameuse interview, confectionnée sur mesure par Borhane Bsaïes, c’est le « désert ».
Et pourtant, grâce à un entourage de courtisans et à l’appui de son « pater », il a réussi à s’approprier la « patente » durant toutes ces années. Une patente qui s’est rétrécie comme une peau de chagrin dans le sens où le parti de Nidaa, qui disposait de 86 députés à l’Assemblée des représentants du peuple, n’a plus, à la veille du scrutin de 2019, qu’une quarantaine d’élus.
Et c’est vraiment in-extrémis que le parti a fini par organiser con congrès électif après avoir cru avoir réuni tous les facteurs pour en faire un plébiscite en sa faveur. En effet, il a contré le groupe des « retrouvailles », il a « poussé la commission chargée de préparer le congrès, il a contraint le président de cette commission à démissionner « en pleurs »…
Mais le fiston n’a pas réalisé, qu’à part le petit groupe de Raouf Khammassi, personne ne croyait en lui. Et même ceux qui ne le lui disaient pas, étaient décidés d’en finir et de le laisser tomber.
Les observateurs estiment que c’est, tout de même, BCE qui aurait compris – certains diront que c’est trop tard -, que Caïd Essebsi junior était, réellement, l’obstacle à toute possibilité de sauvetage du parti, de toute la famille centriste et de tout l’avenir d’une Tunisie moderniste, civile et démocratique.
D’où le fameux discours prononcé à l’ouverture des travaux du congrès. En faisant son « unique requête » de lever le gel de Youssef Chahed, Béji Caïd Essebsi lançait sa manœuvre pour une éventuelle réunification du front centriste qui ne peut se faire sans la rentrée dans les rangs du fiston.
Le message a été compris et saisi par les congressistes qui ont élu un Comité central défavorable à HCE. Et le plus logiquement du monde, il s’est retrouvé pratiquement esseulé au sein du Comité politique, plus haute instance du parti.
Et Ons Hattab, désormais un des personnages forts de Nidaa, a été claire et franche : « Ce n’est pas officiel, mais je peux confirmer sans me tromper que la tendance générale confirme que Hafedh Caïd Essebsi n’aura plus aucun poste clé au sein du parti… », a-t-elle déclaré en substance. Et à moins d’imprévu, ce sera Selma Elloumi, la plus fidèle parmi les fidèles à BCE, qui prendra les commandes du parti. Et le retrait de Néji Jelloul ne ferait que conforter ce nouveau leadership.
Ainsi, BCE aura gagné la première manche de l’action réparatrice qu’il voudrait réussir avant son départ, un départ très probable après avoir annoncé, pour la première fois en public, lors du même discours d’ouverture du congrès de Nidaa, qu’il ne veut pas se présenter pour un second mandat présidentiel même si la Constitution et la loi le lui permettent.
La deuxième manche consiste, selon les observateurs en un autre tout de force avec la réunification de la « famille » centriste moderniste loin de toute cette trouvaille, qualifiée de « débile » de l’islam politique. Une trouvaille chère au lobbyiste Radhouane Masmoudi qui a fait des pieds et des mains pour commercialiser cette idée chez les Occidentaux en leur faisant croire que c’est la seule condition pour avoir la paix et stabilité.
D’ailleurs, à chaque fois où on fait miroiter une défaite d’Ennahdha, ses barons n’hésitent pas à faire des déclarations alarmistes avec des menaces et des risques d’un bain de sang dans le pays.
D’ailleurs, même si certains dirigeants du nouveau parti Tahya Tounès, veulent faire croire à une défaite de BCE face au chef du gouvernement, la réalité pourrait s’avérer toute autre. D’abord, le premier concerné n’a fait aucune déclaration triomphaliste. Au contraire, il s’est montré fort respectueux vis-à-vis du président de la République.
Dans le même ordre d’idées, on enregistre les déclarations encourageantes et raisonnables de Mustapha Ben Ahmed, vrai homme fort de Tahya Tounès qui a eu le mérite de lancer le Bloc national, premier noyau de ce parti. En effet, Mustapha Ben Ahmed a indiqué et répété que ce serait un vrai honneur pour Tahya Tounès si BCE acceptait l’invitation d’assister à l’ouverture des travaux de son prochain congrès.
Or, en présidant les ouvertures des congrès des deux partis, qui n’en faisaient qu’un, et en contribuant à la mise à l’écart de Hafedh Caïd Essebsi, BCE aura balisé le chemin pour ce nouveau rassemblement, condition sine qua non pour rétablir l’équilibre au sein du paysage politique partisan comme il avait réussi à le faire en 2012/2013. Bien sûr, à condition qu’on laisse de côté les alter egos et qu’on évite tout triomphalisme et qu’on se mette dans la tête qu’il n’y a pas une seule « locomotive » et des « suiveurs ».
Ce serait, effectivement, le choc psychologique tant souhaité et espéré par les forces progressistes et centristes pour revenir au premier plan sans dispersion. Et avec un peu d’extrapolation, certains vont jusqu’à prédire le prochain éventuel ticket gagnant ayant pour noms, Selma Elloumi et Youssef Chahed !
Qui l’aurait cru jusqu’à il y a quelques jours ? Aujourd’hui, cela devient une hypothèse plausible. Et puis, n’est-ce pas que tout commence par un rêve !…
Noureddine HLAOUI