
- Gel de plus de 2 500 comptes bancaires, liés à la TSI… dans une finance parallèle adossée à la complaisance bancaire
- 4 Sociétés, 1 Intermédiaire : Anatomie d’un Système de Détournement à Ciel Ouvert!!
- La TSI avait tissé une toile de complicités silencieuses, opérant en marge des règles, mais sous le nez de tous ??!
- Conflits d’intérêts majeurs : quand TSI investit dans… TSI déguisée !!!! avec un parfum de blanchiment… et la pyramide de Ponzi tunisienne qui se précise
- L’objectif n’était pas le rendement, mais bien la captation du cash pour d’autres usages – avec des soupçons croissants de blanchiment de capitaux
TUNIS-UNIVERSNEWS- Le scandale TSI n’a pas fini de livrer ses secrets. L’enquête avance, les ramifications s’étendent… Et c’est tout un pan de la finance tunisienne qui chancelle.
Derrière la façade d’une société d’intermédiation comme les autres, la TSI avait tissé une toile de complicités silencieuses, opérant en marge des règles, mais sous le nez de tous.
90 % des fonds injectés dans… quatre sociétés proches !
Le placement massif de ces fonds s’est concentré sur quatre entités interconnectées :
- MAJED Santé
- MAJED Investissement
- Agrotech
- ADA
Ces quatre sociétés représentent à elles seules 90 % des billets de trésorerie émis, selon les données croisées. Des entités en quasi-faillite, dont les états financiers sont opaques ou absents, et qui partagent un point commun troublant : les présidents de leurs conseils d’administration sont également des employés ou parents des décideurs influents de la TSI.
Conflits d’intérêts majeurs : quand TSI investit dans… TSI déguisée ! –
Derrière le rideau de société, c’est TSI elle-même qui tirait les ficelles. Les dirigeants des sociétés bénéficiaires étaient aussi ceux qui pilotaient les décisions d’investissement chez TSI, créant une bulle d’autofinancement dissimulé, dénuée de toute logique économique.
L’un des volets les plus troublants de l’affaire TSI réside dans la configuration extrême des conflits d’intérêts, à la fois structurels, personnels et institutionnels.
- Des dirigeants “multi-casquettes” : juges et parties
Les quatre sociétés principales bénéficiaires des placements en billets de trésorerie de TSI — MAJED Santé, MAJED Investissement, Agrotech et ADA — n’étaient pas de simples partenaires d’affaires. Elles étaient liées directement ou indirectement à des dirigeants ou hauts responsables de TSI.
Dans plusieurs cas documentés :
- Des membres du staff de TSI siégeaient en tant que présidents ou administrateurs dans les conseils d’administration de ces sociétés.
- Certains dirigeants cumulent des fonctions exécutives dans TSI avec des fonctions stratégiques dans les sociétés financées, parfois sans déclaration préalable ni mur de séparation réglementaire.
Autrement dit, TSI investissait dans des entités contrôlées par ses propres décideurs, créant une auto-référence financière déguisée, et faisant fi des règles élémentaires de gouvernance et de bonne conduite.
- Des décisions d’investissement biaisées par des intérêts personnels
Ce mécanisme crée un effet pervers immédiat :
- L’analyse de risque est faussée dès le départ : il n’y a aucune indépendance dans l’évaluation de la viabilité financière.
- Le processus de diligence préalable (due diligence) devient une formalité vide, les décisions étant motivées non par la performance prévisionnelle, mais par la volonté d’alimenter en liquidités des structures liées.
- Le non-remboursement des billets devient secondaire : les pertes peuvent être justifiées « en interne » et dissimulées derrière la complexité des flux.
- Absence de barrière éthique, opacité des bénéficiaires réels
Dans les faits, la TSI a construit un système d’intégration verticale déguisée :
- Elle collectait l’épargne, en usant de sa crédibilité apparente sur les marchés.
- Elle dirigeait ces fonds vers des sociétés amies ou sous contrôle.
- Et elle diluait toute responsabilité comptable grâce à une gestion éclatée et opaque des bénéficiaires économiques réels.
Plus grave encore, ces sociétés n’avaient pas les capacités de remboursement, ce qui laisse penser que l’objectif n’était pas le rendement, mais bien la captation du cash pour d’autres usages – avec des soupçons croissants de blanchiment de capitaux.
- Un cadre réglementaire inopérant face aux conflits d’intérêts internes
Ce cas révèle l’urgence d’une réforme des règles encadrant les conflits d’intérêts :
- Aucune instance de contrôle — ni le conseil d’administration, ni les comités d’audit, ni les commissaires aux comptes — n’a bloqué ou dénoncé ces montages.
- Le CMF, alors présidé par Salah Essayel, n’a procédé à aucun audit approfondi, malgré les signaux d’alerte sur la structure des investissements.
- La BCT et la CTAF n’ont, à ce jour, fourni aucune information publique sur la traçabilité des flux liés à ces sociétés.
En résumé : un cas d’école de gouvernance défaillante
Des investissements orientés par intérêt personnel,
Des dirigeants impliqués des deux côtés de la table,
Une absence totale de déontologie professionnelle,
Des millions de dinars alloués à des sociétés sans solvabilité ni transparence,
Et un système de contrôle institutionnel soit inefficace, soit complice par passivité.
Exemple édifiant : la clinique MAJED Santé, lourdement endettée et dont les comptes ne sont plus publiés depuis 2021, a pu lever plus de 51 millions de dinars en billets de trésorerie – sans garantie. À ce jour, plus de 15 millions sont déjà en défaut de paiement.
Gel massif de comptes : plus de 900 milliards dans la ligne de mire
Les investigations menées par la justice, la Banque Centrale et le CMF ont conduit au gel de plus de 2 500 comptes bancaires, liés à la TSI, à ses dirigeants, et à ses sociétés satellites.
Le montant global en jeu dépasse les 900 Millions de dinars.
Un parfum de blanchiment : la pyramide de Ponzi tunisienne se précise
Les soupçons vont bien au-delà de la fraude simple. Selon les documents confidentiels et les analyses des flux, le schéma serait typique d’un mécanisme de blanchiment de capitaux via des opérations de marché déguisées.
Des billets de trésorerie ont été massivement utilisés sans garantie, pour financer des entités sans revenus, avec des taux hors norme de 12 à 18 %. Ces produits étaient ensuite recyclés via d’autres investisseurs, dans une logique pyramidale digne de Madoff.
Radiation de TSI, fuite de Sebaï
Le 18 juin 2025, le Conseil du Marché Financier (CMF) a radié définitivement TSI et son PDG, Hafedh Sebaï, en fuite depuis des mois. Malgré quatre convocations ignorées, ce dernier n’a jamais comparu devant les enquêteurs.
Le CMF a listé des infractions d’une gravité extrême :
- détournement de fonds,
- blanchiment d’argent,
- gestion frauduleuse de portefeuilles,
- absence de conformité aux règles AML/CFT…
Les questions qui dérangent : qui savait quoi… et depuis quand ?
Le scandale TSI n’est pas un accident isolé. Il révèle un écosystème financier poreux, complice ou aveugle.
- Le CMF, dans sa version précédente, n’a pas agi malgré les signaux.
- Les commissaires aux comptes n’ont pas alerté à temps.
Un système à bout de souffle
TSI est peut-être tombée, mais ce n’est que le sommet de l’iceberg.
Le scandale n’est pas seulement celui d’une société déviante : c’est celui d’un modèle financier sans garde-fous, où les intérêts privés se sont imposés au mépris de toute éthique.
Il est temps pour la Tunisie de réformer en profondeur son cadre de supervision financière, de recentraliser les contrôles, et de punir sans concession les acteurs de ce désastre.
Le prochain scandale ne sera pas une surprise. Il sera la conséquence de l’inaction.