En état de mort cérébrale

Tawfik BOURGOU

  • Le supplétif des Etats-Unis au Moyen-Orient, le Qatar est financeur des frères musulmans dont le funeste Qaradhawi prédicateur de la campagne de Libye et destructeur de la Syrie et de la Tunisie

  • En vingt ans d’interventions, les Etats-Unis ont perdu le peu de crédit qu’ils avaient encore dans le monde arabe

  • Les pseudo printemps sont passés par là et les potentats savent que l’oncle Sam n’a pas d’amis. Moubarak est encore dans les têtes et les mémoires

  • La défaite américaine dans le monde arabe est morale, elle a eu lieu en 2003 avec la destruction de l’Irak et continué dès 2011 avec les supposées «ingérences démocratiques»

TUNIS – UNIVERSNEWS La politique arabe des Etats-Unis est en état de mort cérébrale. Quel que soit l’issue de ce qui se déroule au Moyen-Orient, c’est à la fin que nous sommes en train d’assister et nous n’attendons plus que le faire-part de décès. C’est un divorce irrévocable entre les Etats-Unis, les peuples et l’intelligentsia arabe et certainement dans d’autres pays musulman. Très peu regretteront cette fausse idylle.
Inaugurée sur le pont du Quincy, elle se termine par un épisode qui montre l’effritement de la posture américaine, son indigence et certainement sa fin.

En guise d’allié stratégique régional, les Etats-Unis ne peuvent s’appuyer que sur un micro-émirat dont 12% du territoire est occupé par une base américaine, le Qatar. A titre de comparaison, comme si Kennedy avait dû s’appuyer sur Trujillo pour démocratiser la zone Caraïbe et combattre Castro. Quelle triste fin !

Le supplétif des Etats-Unis au Moyen-Orient, le Qatar est financeur des frères musulmans dont le funeste Qaradhawi prédicateur de la campagne de Libye et destructeur de la Syrie et de la Tunisie. Le micro-émirat finance ceux que les Etats-Unis se proposent d’aider à les pourchasser par le plus puissant des porte-avions jamais construits. Ami de l’Iran et des talibans en même temps, le micro-Etat qatari, sans antériorité historique, est le jongleur saltimbanque dans la zone clair-obscur de la finissante politique américaine au Moyen-Orient. Là aussi le tableau de la fin est grotesque.

En vingt ans d’interventions, commencées par une suite de crimes de guerres en Irak en 2003, d’interventions et d’occupations d’une partie de la Syrie, les Etats-Unis ont perdu le peu de crédit qu’ils avaient encore dans le monde arabe. A juger par le niveau des rencontres de Monsieur Biden au Moyen-Orient on comprend le gouffre qui sépare certains peuples et certains régimes. Ceux qui ont accepté l’encombrant invité l’ont fait plus par peur que par adhésion. Les pseudo printemps sont passés par là et les potentats savent que l’oncle Sam n’a pas d’amis. Moubarak est encore dans les têtes et les mémoires.

Il n’y a guère que l’Algérie flouée par Moscou dans l’affaire des BRICS qui a maintenu sa réunion majeure à Washington, en guise de lot de consolation Washington aura Alger. Le Maroc pourra apprécier l’infidélité.

La défaite américaine dans le monde arabe n’est pas militaire, personne ne pouvait douter de l’issue des interventions. La défaite est morale, elle a eu lieu en 2003 avec la destruction de l’Irak et elle a continué dès 2011 avec les supposées « ingérences démocratiques » en installant à la tête des Etats d’anciens terroristes, des supplétifs nécessaires pour mener d’autres guerres. On connait le résultat.

Les Etats-Unis sont arrivés à l’exacte contraire de ce qu’ils espéraient en aidant à la destruction des Etats-Rempart : l’Iran, leur ennemi est plus que jamais acteur du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, les regards arabes se tournent vers la Russie et la Chine.

C’est une défaite stratégique qui s’ajoute au désaveu moral, lui aussi irrévocable.

Il y a quelques semaines, le secrétaire d’Etat, Monsieur Blinken s’est fait menaçant à propos de la démocratie, ses ambassadeurs s’activaient autour des sociétés civiles en maîtres et possesseur des lieux et des pays. Le Moyen-Orient les a mis à nu. Qui dans les sociétés civiles, dans les intelligentsias oserait encore accepter ne serait-ce qu’une rencontre ou même un colloque ? Personne.

A la défaite morale et stratégique, les Etats-Unis, à force de soutenir au nom de la démocratie des « peu » démocrates comme les frères musulmans, à force de contradictions, de deux poids deux mesures, ont fini par euthanasier l’idée même de démocratie dans le Monde Arabe.

T.B.
Politologue

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