Par Khélil LAJIMI
Ancien ministre
-
Les images déchirantes qui inondent les médias quotidiennement ont retourné l’opinion publique occidentale, et des médias mainstream, ainsi que certains leaders occidentaux changent de discours
-
Mahmoud Abbas est inaudible et le Hamas est qualifié de terroriste par Washington. De l’autre côté, Netanyahu est contesté et son gouvernement d’extrême droite impopulaire
-
Le Moyen-Orient est actuellement une vraie poudrière et le moindre dérapage risquerait d’embraser toute la région
-
Il semble évident aujourd’hui que les principaux acteurs au Moyen-Orient étaient au courant de l’attaque du 7 octobre
-
MARWAN BARGHOUTHI est la seule figure palestinienne qui a la légitimité pour négocier cet accord
-
Le « processus de paix » est compliqué tant dans sa négociation que dans sa mise en œuvre. Arrive-t-il trop tard ?
TUNIS – UNIVERSNEWS La diplomatie américaine est très active ces derniers jours. Elle travaille même dur, selon Biden en personne.
Officiellement des négociations sont en cours pour libérer les otages contre une trêve humanitaire. Mais, à mon avis, l’objectif va au-delà de la libération des otages. Il s’agirait d’arrêter cette guerre, abominable et inhumaine, et d’établir une «nouvelle» autorité palestinienne fréquentable et ayant une assise populaire. Il faut dire que Mahmoud Abbas est inaudible et le Hamas est qualifié de mouvement+ terroriste par Washington. De l’autre côté, Netanyahu est contesté et son gouvernement d’extrême droite impopulaire.
Les images déchirantes qui inondent les médias quotidiennement ont retourné l’opinion publique occidentale. D’ailleurs, on remarque que plusieurs médias mainstream et même certains leaders occidentaux changent de discours.
Le Plan américain
La diplomatie américaine est devant un constat d’échec sur le dossier palestinien. Elle en assume l’entière responsabilité par son laxisme et son alignement systématique sur la position Israélienne. Le Moyen-Orient est actuellement une vraie poudrière. Le moindre dérapage risquerait d’embraser toute la région avec des conséquences désastreuses pour le monde entier. Imaginons un instant le blocage du détroit d’Ormuz ou bien de Bab El Mandeb, comme menacent les Houthis. Le baril de pétrole atteindrait des niveaux stratosphériques et le couloir logistique de la Mer Rouge et du Canal de Suez serait bloqué. Un vrai cauchemar pour tous les dirigeants du monde.
Qu’elle est la situation pour les Américains ? Une Autorité palestinienne inaudible, le Hamas accusé d’être une organisation terroriste et un gouvernement Netanyahu qui n’a plus de légitimité. Pour arriver à une paix durable avec une solution à deux Etats, un travail diplomatique intense est nécessaire.
Et comme par hasard, on découvre que dès le 8 octobre dernier, le lendemain du 7 octobre, une charte de paix entre Palestiniens et Israéliens était en cours de préparation ! Ce qui laisse planer un doute sur l’attaque du 7 octobre. Il semble évident aujourd’hui que les principaux acteurs au Moyen-Orient étaient au courant de cette attaque.
Les contours de cette charte de paix s’articulent autour des axes suivants :
– Exit le Hamas avec ses branches politique, militaire, économique et sociale. Eliminer la branche militaire du Hamas est loin d’être une promenade de santé. En cas d’échec, tout le processus de paix américain tomberait à l’eau ;
– Exit l’Autorité Palestinienne de Mahmoud Abbas qui a joué le rôle de gendarme israélien depuis les accords d’Oslo sans obtenir la moindre contrepartie, même pas un pouce de terre palestinienne ;
– Exit Netanyahu et son gouvernement d’extrême droite. Son échec sur la libération des otages ne lui sera pas pardonné. En outre, une enquête de la police israélienne prouve que ce sont des tirs « Amis » et non pas les combattants du Hamas qui ont tué les participants à la rave party le 7 octobre.
Le nouveau leadership palestinien
La réussite de ce plan de paix exige un nouveau leadership palestinien. Or la seule figure palestinienne qui a la légitimité pour négocier cet accord est MARWAN BARGHOUTHI. C’est un homme politique et un chef de groupe armé palestinien issu du Fatah. Il est membre du Conseil législatif palestinien depuis 1996 malgré son emprisonnement. Il a joué un rôle important durant la première et la seconde Intifada. Il était alors le chef de file du Tanzim, un groupe paramilitaire du Fatah.
Arrêté en 2002 puis condamné par une cour civile israélienne à une peine de prison à perpétuité pour le meurtre de cinq personnes et pour son soutien au terrorisme. Il se déclare innocent au cours de son procès et affirme être « un homme de paix qui soutient un accord de paix avec Israël ». C’est une figure politique populaire dans l’opinion publique palestinienne.
Les négociations avec MARWAN BARGHOUTHI ne seront pas faciles. Il a vécu l’échec de la mise en œuvre des accords d’OSLO et exigera de réelles garanties.
Autre question de première importance, la participation des acteurs dans la région pour la réussite de cet accord de paix. Et surtout les pays qui soutiennent le Hamas et les négociations pour lâcher le Hamas et plus particulièrement sa branche armée.
L’arrivée de Trump au pouvoir en novembre 2024 risque aussi de changer la donne. Il caracole en tête des sondages. On sait que Trump est proche des évangélistes pour qui Israël est sacrée. En effet les évangélistes sont persuadés que les Juifs doivent de nouveau former la nation d’Israël avant le retour de Jésus sur Terre.
Ce processus de paix est compliqué tant dans sa négociation que dans sa mise en œuvre. Arrive-t-il trop tard ? Mieux vaut tard que jamais. Les intérêts des uns et des autres divergent. Il faudra beaucoup de doigté diplomatique pour arriver à un consensus. Ce n’est pas chose facile. Espérons que la paix gagne et que les Palestiniens puissent vivre en Paix.
Enfin, et en cas d’aboutissement ce sera la première pierre à l’édifice du nouvel ordre mondial.
K.L.